Entretien avec Marc Fromager, directeur de l’Aide à l’Église en détresse (AED), fondation internationale de droit pontifical.
Causeur. Quel regard portez-vous sur l’action de la diplomatie française à l’égard des chrétiens persécutés dans le monde ?
Marc Fromager. Ce n’est pas l’une de ses priorités, et on peut en dire autant des médias et de l’opinion en France. Le soutien aux chrétiens d’Irak a été pour nous une heureuse surprise, mais le mouvement tenait manifestement plus du dégoût des abominations de Daech que de la solidarité avec la communauté chrétienne irakienne.
Que reste-t-il de cette communauté ?
Environ 150 000 personnes. Elle a disparu à 90 %. En Syrie, les chrétiens sont tombés à 2 % de la population, contre 8 % avant la guerre, mais certains reviendront probablement quand la paix régnera. Les relations interreligieuses en Syrie étaient plutôt bonnes. En Irak, en revanche, la disparition du christianisme est à redouter. Malgré la répression, la situation est paradoxalement meilleure en Iran. Le christianisme y progresse, dans la clandestinité. Il y aurait entre 300 000 et 800 000 chrétiens iraniens.
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Et ailleurs au Proche-Orient ?
On parle beaucoup des attaques en Égypte[tooltips content= »Sept morts et 14 blessés dans une attaque de bus en novembre 2018, 27 morts et 49 blessés dans une attaque contre une église du Caire en décembre 2016, 21 morts et 79 blessés dans une autre église, à Alexandrie, en 2011, etc. »]1[/tooltips], mais, concrètement, c’est le dernier grand réservoir chrétien de la région, avec 15 millions de croyants, contre 2 millions seulement dans tout le reste de la zone ! En Algérie, en Tunisie, au Maroc, les chrétiens sont par définition des étrangers. La conversion pose un problème, pour employer un euphémisme [en Algérie, une ordonnance de 2006 punit de cinq ans de prison les tentatives de conversion d’un musulman, NDLR]. L’islam n’accepte pas l’apostasie.
Quel autre pays vous préoccupe plus particulièrement ?
L’Inde. Le nationalisme hindou se tourne aussi contre les chrétiens. Ils représentent 1,6 % de la population seulement, mais les institutions chrétiennes encadrent 20 millions d’étudiants et gèrent 20 % des centres de santé du pays. Pour des partis qui jouent la carte de la pureté nationale à des fins électorales, ces institutions sont des cibles toutes trouvées.
Jusqu’où vont les persécutions ?
Jusqu’à l’assassinat, dans les cas extrêmes. Le plus souvent, elles prennent la forme de vexations, de discriminations. Dans le monde, 200 millions de chrétiens ne sont pas libres de vivre leur foi.
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