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Tri cantonnais

Et dire que les Chinois nous reprochaient notre racisme à leur égard au début de la crise...


Tri cantonnais
© D. R.

La crise du coronavirus, épidémie partie de Chine, a réveillé là-bas à l’égard de la diaspora africaine les mêmes sentiments dénoncés peu avant en Europe à l’égard des asiatiques. A savoir une stigmatisation, sauf que cette fois, on est passé des paroles aux actes. 


En Chine, la censure des réseaux sociaux est censée garantir la concorde nationale. Lorsque les intérêts du Parti communiste sont en jeu, on ne plaisante pas avec les publications virtuelles. Les méchantes rumeurs visant les minorités de l’empire du Milieu se diffusent en revanche à grande allure. Début avril, un bruit diffusé sur les réseaux a rapidement enflammé Guangzhou (Canton) : les Africains seraient touchés par le Covid ! Bien qu’un millier de kilomètres la séparent de Wuhan, cette ville de 15 millions d’habitants a subi soixante-seize jours de confinement, de janvier à fin mars. Quelques jours après son déconfinement, la tension est montée d’un cran à l’annonce de nouveaux cas d’infection, notamment chez les expatriés. La rumeur a grossi le trait et pris comme épouvantail la communauté africaine, arrivée en nombre au début de la décennie 2000 pour profiter du boom économique. Forte de 10 000 âmes, la minorité ouest-africaine a été expulsée des hôtels, confinée d’office et montrée du doigt.

Sur WeChat, l’équivalent chinois de WhatsApp, certains propriétaires ont exigé le recensement, le parquement et l’interdiction de logement chez l’habitant des Cantonais noirs. Des demandes souvent accompagnées de remarques xénophobes que Pékin se garde bien de censurer. Pis, un dessin animé, promouvant le tri des étrangers en les comparant au premier déchet venu, a connu un succès viral. La vague anti-africaine a déferlé sur l’île voisine de Taïwan, poussant le directeur de l’OMS, l’Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, pourtant réputé prochinois, à monter au créneau.

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Mis en quarantaine quatorze jours durant, les Africains de Guangzhou ont pu finalement regagner leurs anciens appartements. Théoriquement. Chez le Cantonais de la rue, les suspicions demeurent. Interrogé par France 24, un Africain expatrié témoigne : « Les propriétaires ont refusé de nous reprendre, ils ont affirmé que c’étaient les directives du gouvernement. » Officiellement, le ministère des Affaires étrangères chinois évoque de « simples malentendus ». Il y a encore trois mois, quand certains Asiatiques d’Europe étaient désignés comme des malades en puissance, Pékin tolérait moins les quiproquos…

Mai 2020 – Causeur #79

Article extrait du Magazine Causeur




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Journaliste , conférencier et historien.

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