Sans lui, la musique des Rolling Stones ne sera jamais plus tout à fait la même.
J’étais en train de cuisiner un risotto, je jette un œil sur les réseaux sociaux, et j’apprends la mort de Charlie Watts, le batteur des Stones, à l’âge de quatre-vingt ans.
Je m’y attendais cependant, on avait annoncé qu’il ne serait pas de la prochaine tournée des Stones. Le moins scandaleux de la bande, celui qui n’était pas couvert de groupies, d’ailleurs il n’aimait pas ça, qui est resté avec la même femme toute sa vie, a tiré sa révérence le premier (exception faite de Brian et sa piscine). Il était le pilier des Stones, le métronome, lit-on partout, imperturbable et so british derrière sa batterie, pendant qui Mick se contorsionnait. Keith disait de lui qu’il était « le lit sur lequel il était allongé », sa colonne vertébrale en quelque sorte. Avec son élégance et son air de ne pas y toucher.
La parole aux spécialistes
J’ai toujours en tête cette photo du groupe période Aftermaths. La photo est en noir et blanc, ils marchent tous les cinq côte à côte, Brian était bien sûr toujours en vie, il est, avec Keith, le plus excentrique, avec sa tenue d’Oscar Wilde hippie, Keith avec une fourrure blanche négligemment jetée sur ses épaules. Et Charlie est le seul à être en costard cravate, un pantalon un peu feu de plancher cependant, nous sommes au mitan des années 60. Il esquisse presque un sourire. Ils sont beaux, la quintessence de l’élégance rock’n’roll. J’avais épinglé cette photo au mur de mon studio d’étudiante, que j’avais arrachée je crois, dans Les Inrocks à l’époque où ils étaient dignes. Et comme je ne suis pas rock critic, juste une ex groupie que le rock’n’roll aura aidée à vivre, je vais laisser la parole aux spécialistes.
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Le DJ Jérôme Pigeon lui rend sur Facebook un bel hommage : « Il reste le plus charmeur et le plus inspiré des batteurs de rock, lui qui n’écoutait que du jazz, il aura été le ciment des Stones, une vie passée entre deux drama queen. Merci pour tout Charlie ».
Accro à l’héro
Dans une interview accordée à Télérama en 1998, il raconte avoir détesté la période 60-70 du groupe : « Toutes ces gamines hurlant pendant nos concerts, et le prétendu mode de vie « sex drugs and rock’n’roll » m’ont toujours paru ridicules et malsains ». Il sacrifiera cependant au mode de vie rock’n’roll, ayant été accro à l’héroïne à l’âge de quarante ans. Bizarrement. La colonne vertébrale a un peu vacillé. Il se voit, non pas comme le plus sage du groupe, mais le plus intègre, il est toujours resté très proche de Mick et Keith, musicalement dans son rôle, essentiel, de batteur. « Ma position ? Celle de tout batteur : assurer la rythmique, maintenir la cohésion musicale entre chaque instrument et fournir une plate-forme musicale aux autres ». Le ciment du groupe disait Jérôme Pigeon. C’est Brian qui l’a déniché en 63, alors qu’il faisait la tournée des boites de Londres qui jouaient du blues pour recruter des musiciens. Charlie était, avec Brian, peut-être le plus grand musicien du plus grand groupe de rock’n’roll du monde. Le plus grand batteur du monde ? Je suis trop béotienne pour en juger.
Ce dont je suis sûre, c’est que celui qui disait détester le rock’n’roll, qui n’aimait rien tant qu’accompagner des petits groupes dans de petits clubs de jazz, est maintenant quelque part au firmament des rock stars. It’s only rock’n’roll, Charlie, and we like it.