Et ce n’est pas un problème.
A l’heure actuelle, certains parlent haut et fort pour réclamer des réponses aux questions et objections suivantes : Pourquoi un couronnement ? N’est-ce pas trop archaïque ? Tout cela ne coûte-t-il pas trop cher ? N’est-ce pas obscène, même, d’étaler toutes ces richesses – robes, bijoux, joyaux, carrosses… – à un moment où l’inflation touche durement le budget des familles britanniques ?
Tâchons d’y répondre !
Archaïque? Certes, la couronne d’Angleterre est une institution qui a 12 siècles d’âge. Mais c’est une des institutions les plus anciennes du monde occidental. Plutôt qu’un anachronisme, elle représente la continuité. Et la continuité est devenue une qualité trop rare dans notre monde. Entre les dictateurs et les idéologues, il y a trop de gens qui veulent détruire tout ce qui est ancien pour ne laisser que leurs propres créations, afin de circonscrire notre horizon temporel et moral à leur monde carcéral – afin de nous couper de nos racines historiques et nous transformer en pâte à modeler cérébrale. Autant remplacer Notre-Dame par un supermarché où les pyramides par un complexe sportif !
A lire aussi: Le couronnement de Charles III passionne-t-il vraiment les Britanniques?
Ça coûte cher, un couronnement ? Sans doute et c’est l’État qui paie. Mais ces fastes royaux sont les fastes de l’État. Charles est le chef d’État du Royaume Uni, et la monarchie est le pilier de la Constitution britannique, laquelle est le fruit d’une longue évolution vers la démocratie. L’histoire, la continuité et l’importance suprême de la Constitution doivent s’exprimer avec grand style, voire avec majesté. Pourquoi le cérémonial de l’Union européenne est-il si pauvre ? Pourquoi inspire-t-il si peu ses citoyens ? Le coût pour l’État britannique du couronnement est largement compensé par la stimulation apportée à l’économie par l’évènement ; elle pourrait se chiffrer à plus de 1,1 milliard d’euros. Seul bémol, le jour férié spécial du lundi 8 mai (qui n’est pas normalement férié outre-Manche) va porter un coup à cette même économie, mais au moins on est quitte.
L’obscène richesse de la monarchie ? Il est vrai que toutes les activités accomplies au nom de l’Etat par le roi Charles, ainsi que par les autres membres de la famille royale qui travaillent pour l’Etat, sont financées par l’Etat. Mais d’où vient cet argent? Depuis le XVIIIè siècle, les domaines appartenant à la couronne sont gérés et exploités par le gouvernement. Normalement, seuls 15% des bénéfices sont attribués à la maison royale. En ce moment et jusqu’en 2027, c’est 25% afin de couvrir les réparations au Palais de Buckingham. Certains médias ont dénoncé la fortune personnelle du roi, estimée à entre 700 millions et 2 milliards d’euros. Le roi et son dauphin, William, ont leurs propres domaines, notamment les duchés de Cornouailles et de Lancaster. Ce n’est guère étonnant si cette famille a accumulé des richesses au cours de 12 siècles. Et c’est quand même moins que les Bernard Arnault et les Jeff Bezos n’ont fait en quelques décennies. Pourquoi attaquer une fortune relativement modeste, acquise et maintenue lentement et pas les autres ? Il faut plutôt demander le secret d’une gestion aussi sûre, aussi résistante aux aléas du temps.
A ne pas manquer: Causeur #112: «Schiappa la chipie» Après Playboy, elle répond aux puritains
Aujourd’hui, tout le monde veut être jeune, moderne, branché, tendance et faire le buzz.
Il vaut beaucoup mieux durer, vieillir dans la sagesse et devenir ancien.
Après tout, avec un peu de chance, devenir ancien, c’est notre destin à nous tous et – avec beaucoup de chance – celui du genre humain.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !