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Chalon et ses drôles de dames


Chalon et ses drôles de dames
Jean Chalon, Photo : Maurice Rougemont. Leemage/Opale.

 


C’est un rare plaisir que de boire du champagne avec Jean Chalon, un écrivain qui gouverne le peuple de sa mémoire. On y croire les fantômes de Louise de Vilmorin, Marie Bell et Florence Gould. Entretien avec le témoin bienveillant et élégant d’un monde à jamais disparu.


 

Patrick Mandon. Natalie Barney, Louise de Vilmorin, Colette, Alexandra David-Néel, Marie-Antoinette, Liane de Pougy, Florence Jay-Gould, George Sand… Vous êtes l’homme, sinon de toutes les femmes, du moins de quelques-unes, et non des moindres.

Jean Chalon. De certaines d’entre elles, je fus le chaste « escort boy ». Toutes, d’une manière ou d’une autre, je les ai admirées, aimées. Je crains l’ennui par-dessus tout : elles ont enchanté mon quotidien. Par surcroît, grâce au succès des livres que je leur ai consacrés, elles ont « amélioré mon ordinaire ».

Reprenons par le commencement : vous êtes natif de Carpentras…

Et j’ai 25 ans lorsque j’arrive à Paris en 1960, afin d’y préparer l’agrégation d’espagnol. Je fais la connaissance de Pierre Gascar (prix Goncourt en 1953 pour Les Bêtes). Il m’encourage à écrire quelque chose, qu’il promet de soumettre à Maurice Noël, directeur du Figaro littéraire. Mon article paraît sous le titre : « Ces Espagnols qui arrivent à Paris ». Le texte plaît à Pierre Brisson, grand patron du Figaro. Maurice Noël m’enrôle dans son équipe. Le 11 mai 1961, je me rends au siège du journal, rond-point des Champs-Élysées, où je rencontre un jeune homme mince et brun, engagé l’année précédente : Bernard Pivot. Entre nous, la sympathie fut immédiate, et elle dure encore.

Vous avez prononcé le nom de Louise de Vilmorin, qui paraît souffrir d’une plaie d’argent, dont on trouve l’écho dans nombre de ses écrits. Comment expliquez-vous cette « misère » ?

Henry Leigh Hunt, son premier mari, cherchait des placements financiers. On lui indiqua des terrains à vendre « dans le Nevada, près d’un village perdu du désert des Mojaves ». Louise l’encouragea : « Achetez-les donc ! » Le village s’appelait… Las Vegas. Louise dira, plus tard, après leur divorce : « Il me donne juste de quoi acheter mon Rimmel ! », ce qui n’était pas vrai, il lui versait une confortable pension, mais elle était très dépensière. Elle chercha à inventer l’eau bleue, prétendant que, si l’on ne buvait pas volontiers de l’eau, c’est parce qu’elle n’avait pas de couleur. Elle mit longtemps dans cette eau bleue un fol espoir de richesse, tout à fait vain. Ses dîners, à Verrières-le-Buisson, accueillaient 20 ou 25 personnes. Arrive un soir, d’Espagne je crois, où il


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Octobre 2018 - Causeur #61

Article extrait du Magazine Causeur




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Né à Paris, il n’est pas pressé d’y mourir, mais se livre tout de même à des repérages dans les cimetières (sa préférence va à Charonne). Feint souvent de comprendre, mais n’en tire aucune conclusion. Par ailleurs éditeur-paquageur, traducteur, auteur, amateur, élémenteur.

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