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C’est tout l’art épistolaire que La Poste assassine…

Le génie administratif français atteint son apogée...


C’est tout l’art épistolaire que La Poste assassine…
La Poste annonce la suppression du timbre rouge, le 22/07/22 /©Mourad ALLILI/SIPA

Depuis le 1er janvier 2023, le timbre rouge a disparu. Une décision de La Poste, laquelle met en place un nouveau service pour les lettres prioritaires, la e-lettre-rouge… sur Internet. Sophie de Menthon s’en désole.


Nous venons d’apprendre que le timbre rouge n’était plus valable. Vous savez, le fameux timbre rouge qui signifiait que le courrier était urgent. Au passage, que fait-on des timbres rouges que l’on a en stock, et qui valaient plus chers que les verts ?

Il fallait bien remplacer l’urgence par quelque chose… et là, la Poste nous livre, en recommandé, l’apogée de ce que l’absurdie peut produire !

Il y a donc un fonctionnaire créatif, un artiste, cautionné par beaucoup d’autres probablement, qui a eu cette idée géniale : si vous avez une lettre urgente à envoyer, en tant que particulier (il est entendu que les entreprises ne mettent plus de timbres depuis bien longtemps), vous allez donc devoir taper votre missive sur votre clavier puis l’envoyer par mail au bureau de poste. Quel bureau de poste ? Et comment récupère-t-on son adresse e-mail ? Le génie administratif français atteint son apogée : au bureau de poste, des postiers (qui ont apparemment du temps libre, alors qu’ils sont souvent incapables d’assurer les tournées, passons…), des postiers donc, vont imprimer votre lettre et la mettre sous enveloppe eux-mêmes puis l’acheminer… par courrier. Il fallait y penser ! C’est le grand retour du fax, mais par ordinateur et distribution ambulatoire… Je ne ferai l’injure à personne de sous-entendre qu’il y a, parmi mes lecteurs, des gens qui n’ont pas d’ordinateur. Mais n’y a-t-il pas quand même, pour d’autres, une discrimination dans le service public ? Ça se plaide !

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Parallèlement, je ne mettrai évidemment pas en doute la discrétion des agents des « PTT », lesquels ne liront pas la lettre qu’ils ont entre les mains, confidentialité oblige ! Personnages publics, s’abstenir, amants cachés aussi, et ne parlons pas du reste !

Au-delà de l’incongruité – le mot est faible – de ce nouveau et très moderne système du traitement de notre courrier personnel, c’est un choc culturel profond que cette petite révolution à La Poste engendre subrepticement.

Car, quel mépris vis-à-vis de nos belles lettres ! Nos lettres d’amour… Les fleurs séchées… Cette écriture particulière, si chère à nos yeux, que l’on reconnaissait dès l’enveloppe, ces jambages élégants tant aimés (cette partie de soi-même qui est déjà un message, cette écriture qui veut dire tant de choses et qui peut remplacer un baiser)… La lettre ou la belle carte postale pour parler des vacances… Les petits récits du quotidien calligraphiés avec soin… La grand-mère qui envoie un « petit billet » à son petit-fils… Bref, tout ce charme de la « correspondance » que l’on va détruire même s’il était, c’est vrai, déjà menacé ou du moins en désuétude. Oui, Madame de Sévigné peut se retourner dans sa tombe, c’est l’art épistolaire qu’on assassine. La graphologie en a pris un vilain coup !

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Chef d'entreprise, présidente du mouvement ETHIC.

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