Le Parisien nous a appris hier que l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), organisme chargé de contrôler les messages publicitaires[1. Vous savez, ce sont les gens qui ont longtemps hésité avant de préconiser qu’on ne retire finalement pas sa pipe à Jacques Tati.], avait enjoint à la société JC Decaux de retirer de ses panneaux les affiches du film Les infidèles, qui sort sur nos écrans le 23 février prochain.
L’une des affiches incriminées représente l’acteur Gilles Lellouche debout en train de téléphoner à son épouse légitime, la tête d’une autre femme au niveau de son entrejambe de façon à laisser penser qu’elle lui prodigue une gâterie, accompagnée de la légende :« Ça va couper, je rentre dans un tunnel. » Une autre affiche représente le désormais célèbre Jean Dujardin devant des jambes (en l’air) féminines.
« Notre jury de déontologie ne s’est pas encore réuni car les plaintes viennent d’arriver, précise Stéphane Martin, le directeur général de l’ARPP. Pour l’affichage extérieur, il n’existe pas de contrôle préalable. Mais nous estimons déjà que cette campagne est contraire aux règles sur l’image de la personne humaine, bien qu’elle se rapporte au sujet du film, qui est une comédie sur l’adultère. »
Il est sympathique, ce représentant de l’ARPP. Et surtout sûr de lui. Il connaissait le résultat des délibérations du jury de déontologie avant même que celui-ci ne se réunisse. Entendons-nous bien. On a tout à fait le droit de trouver ces affiches vulgaires. De là à les trouver contraires aux règles sur l’image de la personne humaine, faudrait quand même pas pousser Mémé dans les orties. Parce que lorsque je me balade en ville et que je vois, devant chez mon marchand de journaux, la promotion de revues avec force femmes en cuir et regard insistant, je trouve les affiches des Infidèles plutôt gentillettes. On me dira que la promo du ciné est soumise à autorisation et pas la pub sur la presse. C’est sans doute vrai mais il faudrait m’expliquer pourquoi.
Il paraîtrait que ces affiches seraient sexistes et misogynes, qu’elles donneraient une image dégradée de la femme. Pardonnez-moi mais cela dépend de quel côté on se place, si j’ose écrire. Parce que l’infidèle en question, menteur, traître à son couple et sa famille, ainsi représenté, c’est bien l’homme et pas la femme. Et il se trouve qu’il existe aussi des femmes infidèles[2. En général, lorsqu’un homme trompe sa femme, c’est avec une autre femme, laquelle n’est pas forcément célibataire…]. On peut donc considérer que l’affiche donne une image dégradante de la gent masculine, honteusement stigmatisée.
Toujours est-il que la cause des femmes – enfin surtout celles qui sont choquées – semble bien défendue par l’ARPP, laquelle a décidément des problèmes avec le concept de pipe, puisqu’elle vient officiellement de préconiser la censure préventive, comme d’autres avaient naguère défendu le principe d’action militaire préventive.
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