Après la salafiste pride du week-end dernier, sobrement appelée « Salon de la femme musulmane de Pontoise », une seule élue avait vigoureusement pris la parole pour dénoncer cette atteinte aux valeurs de la France : Céline Pina, conseillère régionale socialiste sortante d’Île-de-France. Il faut dire que cela fait un peu désordre dans la patrie des droits de l’homme, qui a plutôt la tradition des joutes entre Voltaire et Rousseau, un débat entre prédicateurs salafistes sur la meilleure façon de marie-trintigner sa femme voilée. Chez Bourdin, Céline Pina avait regretté la tenue de cet événement – heureusement perturbé par les Femen – que la mairie aurait très bien pu interdire pour menace de trouble à l’ordre public. Après tout, imagine-t-on l’organisation d’un « salon du migrant » où des prêcheurs de haine discuteraient du bienfondé des ratonnades ?
L’intervention de la socialiste fut très remarquée, notamment d’une fraction de la population regrettant l’abandon par la gauche de la laïcité et d’une certaine idée de la femme qui sont l’une des mamelles de l’identité française. Mais Céline Pina n’a pas fait que des heureux, surtout dans son propre parti. Sa prise de position courageuse lui vaut en effet… une menace d’exclusion du PS, signée de la main même de Rachid Temal, premier fédéral du Val d’Oise ! Depuis juillet, on sait que ce dernier conduira la liste socialiste aux régionales dans le département en lieu et place de l’élue rebelle, qui ne souhaitait pas se représenter en raison des « positions floues » de Solférino sur la « laïcité, le communautarisme » et une forme de « clientélisme » à l’échelle locale. Quand les choses sont floues, il y a un loup, dirait Martine Aubry – qui maîtrise par ailleurs très bien ces dossiers. Le paysage s’éclaircit lorsqu’on connaît la préférence croissante des apparatchiks socialistes pour la « diversité » (ethnique) au détriment de l’égalité (sociale, économique, sexuelle).
Bref, pas besoin d’être Jérémie pour comprendre ce qui s’est tramé en coulisse, il suffit de lire la prose de l’accusée Pina pour comprendre que son combat féministe et laïque – deux nouveaux gros mots au PS ? – dérange. Ainsi écrivait-elle au lendemain des attentats de janvier, sans craindre de briser l’unanimisme charliste : « Trois mots reviennent souvent dès que l’on évoque le massacre perpétré à Charlie Hebdo: « Pas d’amalgames! » Je comprends cette nécessité mais une telle injonction ne sera possible que si elle ne s’opère pas au prix d’un déni. Bien sûr que faire l’amalgame musulman égale terroriste serait un désastre, mais nier le fait que des courants obscurantistes exercent une pression de plus en plus forte sur la communauté musulmane, que ces courants gagnent du terrain, que certains jeunes et moins jeunes sont fascinés par la violence et la brutalité de Daesh et que leur rapport à la religion les amène à rejeter des éléments fondamentaux de notre contrat social (égalité femmes/hommes, laïcité, liberté d’expression) serait pire encore.»
Padamalgam, padamalgam, padalmagam, point : le mantra du socialisme réellement existant n’admettait aucune virgule, nuance ni « mais ». Pour avoir enfreint ce tabou et brossé un tableau du cancer islamiste qui gangrène la société, Céline Pina s’est fait de sérieux ennemis. Parler le Cambadélis, c’est tout un art : comparer l’« islamophobie » à l’antisémitisme, l’Etat islamique à Israël, histoire de se ménager le vote antisarkozyste des banlieues, demande du métier. Et une sacrée dose de roublardise. Au risque de saborder sa carrière, Céline Pina n’incrimine pas le Front national ou je-ne-sais-quel nervis fascistes sortis de derrière les fagots lorsqu’il s’agit de combattre l’islamisme immense et vert.
Dans sa tribune choc du mois de janvier, Céline Pina interpellait ses camarades : « nos élus locaux, parfois si engoncés dans leur clientélisme et souvent eux-mêmes peu au fait sur ces questions, auront-ils le courage de porter cette parole? Surtout lorsque l’on sait que cela peut faire de vous une cible? Faut-il laisser les enseignants se battre seuls sur des problématiques aussi dangereuses, alors qu’ils se font déjà souvent agresser par des élèves ou leurs parents sur des problèmes qui vont de la revendication du halal, du port du foulard à la difficulté d’enseigner la Shoah? »
Huit mois plus tard, l’élue de banlieue tient sa réponse.
P.S : Tandis que le premier secrétaire fédéral du PS-95 dément l’exclusion de Céline Pina, cette dernière maintient que Rachid Temal souhaitait l’évincer de son parti. Il y aurait renoncé, faute de soutiens. Enfin une bonne nouvelle !
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