Quel est le point commun entre Donald Trump et Christophe Castaner ? L’usage abusif des fake news, ces balivernes qui nous font prendre des vessies pour des lanternes, des éoliennes pour des agents cancérigènes et les gilets jaunes pour des casseurs antisémites…
On devrait proposer ce jeu dans les ateliers d’écriture : « Toi aussi, invente le mensonge le plus gros possible sur le sujet de ton choix. » On vient en effet d’apprendre, par le biais du Washington Post, que Donald Trump, depuis son élection, a menti 9451 fois. Le journal a arrêté son décompte au 1er avril dernier. Ce qui signifie que ce chiffre de 9451 est déjà dépassé. En effet, Donald Trump a menti en moyenne six fois par jour sur sa première année de mandat pour monter à vingt deux fois par jour sur les six derniers mois. Le mensonge, pour Trump, c’est une drogue dure. Il lui en faut toujours plus pour obtenir le même plaisir. Dans son cas, on est en présence d’un mélange étonnant de bêtise, d’inculture et de paranoïa, comme chez le dernier des complotistes de bistrot. Il n’en est pas encore à dire qu’il y a une base militaire nazie sur la face cachée de la lune depuis 1945 ou que le président Kennedy a été assassiné par des Illuminati mais on s’en approche en douceur.
Plus c’est gros…
On appréciera un des derniers en date, lancé lors d’un dîner avec les élus républicains du Congrès : « Le bruit des éoliennes donne le cancer. » La phrase est belle comme une proclamation surréaliste. Il a tout de même fallu un démenti des associations américaines de médecine pour contrer la parole présidentielle. Parce que précisément, ce n’est pas sorti de la bouche d’un pilier de comptoir mais du président des Etats-Unis. Evidemment, on comprend la raison de ce mensonge dans la logique de Trump, tout entier inféodé aux lobbys du pétrole et du nucléaire. Il doit absolument discréditer les éoliennes. Mais balancer qu’un bruit donne le cancer, on reconnaîtra qu’il fait fort. Chez nous, Marine Le Pen, qui n’aime pas non plus les éoliennes, explique qu’elles coûtent 8 milliards d’euros par an. C’est faux, en fait on est plutôt dans les 1, 3 milliard. Mais au moins, ça a l’air vrai. C’est peut-être en cela que si c’est moins idiot, c’est sans doute plus dangereux.
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Encore que : on en est tout de même au stade où il faut démentir ce qui aurait autrefois fait éclater de rire n’importe quelle personne un peu sensée. Il faut croire que Trump a compris – il aura au moins compris quelque chose- le principe de Goebbels, le ministre de la Propagande du IIIème Reich : « Plus c’est gros, plus ça passe. » Ou alors que Trump illustre parfaitement la prophétie d’Idiocratie…
Mensonges d’Etat made in France
Il y ajoute aussi sa propre note : « Plus un mensonge est répété, plus on a de chances de finir par le croire. » Le Washington Post relève ainsi que parmi les 9451 mensonges prononcés par Trump, ceux qui sont répétés plusieurs centaines de fois concernent l’immigration et le fameux mur qu’il rêve de construire entre le Mexique et les USA.
Ok, moquons-nous de Trump et, plus généralement, de la propension au mensonge des populistes d’extrême droite pour faire passer des « fake news ». Mais, nous, sous le règne de Macron, sommes-nous vraiment mieux lotis ?
Il y aura une histoire à faire des mensonges d’Etat qui ont été proférés à propos des gilets jaunes. Il faudra étudier, par exemple, les propos de Castaner, qui continue à nier la révolte sociale, la lutte des classes qui se répète chaque samedi pour tenter de faire passer des gens qui réclament une vie qui ne soit pas une survie, pour des casseurs antisémites, des brutes factieuses, j’en passe et des meilleures. Le système est certes plus élaboré que celui de Trump. Le Nouveau Monde macroniste n’aime pas passer pour un régime autoritaire qui mutile, qui arrête, qui vote lois d’exception sur lois d’exception. Alors, il fait mine d’ouvrir un grand débat bidon dont il a lui même fixé les sujets. Ils n’en sont pas (encore) à dire que le bruit des gilets jaunes donne le cancer mais ça pourrait venir. On nous a déjà fait comprendre que l’augmentation des morts sur la route et celle des cambriolages, c’était la faute des gilets jaunes qui cassaient les radars et occupaient trop les pandores avec leurs manifs.
Pourtant, le bruit des gilets jaunes, on a l’impression depuis six mois qu’il lutte plutôt contre un cancer bien particulier : celui du néolibéralisme imposé à marche forcée en France par ce président si jeune et si intelligent mais qui ressemble de plus en plus à Donald Trump perdu dans son univers parallèle.
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