Tous les éditeurs cherchent la martingale imparable, celle qui garantit l’entrée directe dans le Top 50 des meilleures ventes. La machine à imprimer des best-sellers. Les piles de livres érigées à l’entrée des supermarchés, les queues dans les salons et l’auteur, mi-VRP, mi-intello, invité permanent des plateaux de télévision, qui fait la réclame. En somme, l’homme qui murmure à l’oreille des lectrices, le rêve de tous les marchands de papier. Car, c’est vous, Mesdames, qui achetez du roman. Dans les années 50, on avait trouvé la solution : apposer sur la couverture, le doux prénom de Caroline, synonyme de sensualité et d’aventures. A destination d’un public féminin auquel les hommes se rallièrent avec gourmandise, Jacques Laurent, sous le pseudonyme de Cecil Saint-Laurent, inventa Caroline Chérie en janvier 1948.
Une aristocrate pas nunuche pour un écu plongée dans les soubresauts de la période révolutionnaire et du Consulat. Moins prude qu’Emma Peel et plus libre qu’Emma Bovary, Caroline de Bièvre incarne une délicieuse héroïne assaillie par les élans du cœur et du corps. Jacques Laurent, futur académicien, hussard de fortune, pourfendeur de Sartre, de la police du langage et grand défenseur du roman « qui n’endoctrine pas » n’était, à cette époque-là, qu’un jeune homme à l’imagination florissante avec ce don inné pour le dialogue piquant et le coup médiatique. Après 750 heures de recherches à la Bibliothèque nationale, 25 kg de documentation réunie sur le sujet, il s’attela aux 900 heures de rédaction donnant naissance à un roman traduit en douze langues et vendu à 5 millions d’exemplaires. Caroline Chérie devint dans la France de Vincent Auriol l’expression du désir. Au cinéma, Martine Carol la campa « en chair et en os » selon l’expression même de son auteur. Quelle autre actrice aurait pu, à ce point, personnifier le destin de la belle tourangelle ? Seule, la fragile Martine, notre Marylin basque, concentré d’érotisme et d’abandon, pouvait relever cette gageure. Aujourd’hui, le nom de Martine Carol ne fait plus fantasmer que quelques cinéphiles libidineux et les aventures de cette héroïne de papier n’avaient pas été republiées depuis longtemps. L’Archipel a réparé cette injustice en faisant paraître les deux gros tomes de Caroline Chérie en 2013.
L’éditeur a poursuivi « cette fresque historico-libertine » en sortant à l’automne dernier « Un caprice de Caroline chérie ». Notre tourangelle préférée faisait cette fois-ci des ravages sur les rives du Lac de Côme. Après la victoire de Bonaparte à Marengo, Caroline n’a rien perdu de son sex-appeal et de ses contradictions. Jacques Laurent lorgnait sur La Chartreuse de Parme pour imaginer une histoire picaresque et perverse où l’inconstance du désir réveille les corps. En ce début d’avril 2014, avant les week-ends à rallonge et comme un parfum d’insouciance estivale, les deux premiers tomes qui couvrent les périodes 1789-1794 et 1794-1800 sortent en poche. En format mini, cette Caroline est une compagne de plage qui vous assurera un plaisir de lecture maxi.
Caroline Chérie, Jacques Laurent (Cecil Saint-Laurent) – Archipoche – 2 tomes (1789-1794/ 1794-1800).
Un caprice de Caroline chérie, Jacques Laurent (Cecil Saint-Laurent) – L’Archipel.
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