Une biographie signée du journaliste Marc Dolisi célèbre Carla Bruni, artiste à la scène, femme d’ex-président à la ville. Une belle balade qui aurait mérité portrait psychologique plus poussé.
« Toute femme est une énigme », écrit Marc Dolisi, journaliste, ancien directeur de Max et VSD. Intime de Carla Bruni, il a pris des dizaines de thé vert avec l’ex-première dame de France, on se dit que l’énigme va être résolue à la fin de l’ouvrage Un après-midi chez Carla qu’il vient de publier.
Une patricienne rock’n’roll
Carla Bruni, c’est un parcours atypique. Elle est née dans une riche famille italienne. Son père, Alberto Bruni Tedeschi, est issu d’une dynastie d’industriels turinois qui ont fait fortune dans la fabrication de pneumatiques. C’est un mélomane qui compose des œuvres lyriques. Sa mère, Marisa Borini, est pianiste. Elle est belle et possède la folie des extravagants. Carla naît le 23 décembre 1967. Elle a un frère, Virginio, né en 1960, décédé des suites du sida en 2006, et une sœur, Valeria, scénariste et réalisatrice. Peu avant la mort d’Alberto, Carla apprend qu’il n’est pas son géniteur. Son père biologique se nomme Maurizio Remmert, il vit au Brésil. Jeune guitariste, Maurizio était tombé amoureux de Marisa. Leur liaison fut passionnée. Ils s’aimèrent jusqu’à la naissance de Carla. C’est une belle entrée romanesque dans la vie. Ça crée des failles, ça renforce la part noire de cette femme, écorchée vive, artiste dans l’âme. Carla sera une femme libre et rock’n’roll.
Carla vomit les tièdes
Sa silhouette longiligne et androgyne séduit les hommes. C’est une amoureuse. Elle ne supporte pas la tiédeur. La relation doit être pleine de fureur. Elle confie à Marc Dolisi : « Je ne peux être amoureuse que si l’on est amoureux de moi. » On s’en doute. Elle recherche l’homme d’esprit qui froisse les draps de percale. Un écrivain, dont on ignore le nom, se retrouve dans le lit de Carla, confie Marc Dolisi. Il ne se passe rien. Blocage psychologique, quelques mots d’excuse. Elle lui indique la porte. Quoi de plus normal. La chair n’est pas triste, et une vie ne suffit pas pour lire tous les (bons) livres. Celle qui accède au rang de top model en 1988, défile pour les plus grands couturiers, Yves Saint Laurent, Versace, Valentino, Galliano, Karl Lagerfeld, ce dernier ne lui impose pas de porter la robe de mariée, jugeant qu’elle n’est pas crédible dans le rôle d’une vierge, cette femme, qui prend la lumière avec un naturel insolent, collectionne les artistes célèbres.
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Il faut reconnaître que sa manière de marcher fascine. Elle possède la grâce. « Quand on a des jambes pareilles, écrit, sous le charme, Marc Dolisi, nerveuses et tendues comme des fouets, c’est pour marcher, pas pour coucher, sauf pour faire l’amour. » Elle aurait pu suivre le mouvement En marche d’un certain Emmanuel Macron. Mais son cœur battait pour un autre président de la République, Nicolas Sarkozy.
Après Louis Bertignac, Eric Clapton, Mick Jagger (elle ne l’avoue pas ouvertement, trop torride amour), Arno Klarsfeld, Raphaël Enthoven (un enfant : Aurélien), et quelques autres, elle tombe amoureuse de Sarkozy. Elle n’est plus mannequin, elle chante, joue de la guitare, promène sa silhouette, toujours svelte, sur les scènes mondiales.
Éloge du couillu
S’ennuie-t-elle ? Son sang, d’habitude bouillant, se refroidit-il ? A-t-elle besoin d’une ligne d’amour pur, sa came ? Leur première rencontre a lieu chez Jacques Séguéla, le publicitaire « le plus ravalé de France », à Marnes-la-Coquette, le 13 novembre 2007. Sarkozy vient de divorcer de Cécilia. Il ne va pas bien, même s’il est président. « Il fallait une femme de la trempe de Carla pour permettre à ce sentimental pragmatique de se relever », note l’auteur. Après le coup de foudre réciproque, tout s’emballe. Normal, c’est Sarko aux commandes. Le 2 février 2008, à 10h45, dans le salon vert de L’Élysée, au premier étage, François Lebel, maire du 8e arrondissement de Paris, marie Carla et Nicolas. Vous avez dit romanesque ? Plus que jamais. Les caméras ne cessent de les filmer, la presse people se régale. Carla a la dent dure. Elle défend celui qu’elle appelle « Mon Raymond », dans l’une de ses chansons.
C’est un mec « couillu », capable de faire le coup de poing pour la défendre. Par contre, elle déteste Hollande, « Le Pingouin », qui n’a pas raccompagné jusqu’à sa limousine le couple déchu lors de la passation de pouvoir, à l’Élysée.
Carla aime les bonnes manières. Quand Sarkozy tente de revenir en politique et se soumet à la primaire de la droite et du centre, elle est confiante. Son mari est le meilleur, dit-elle. Battu par François Fillon, « le collaborateur », Carla balance, de sa voix douce, quand ce dernier trébuche avec le « Penelopegate » : « Ah, il est beau le catho tout propre qui donne des leçons de vertu à tout le monde. »
Sarkozy, rock star des salles
Dans ce livre, qui se lit vite, on regrettera que Dolisi, malgré son intimité avec son sujet, n’ait pas réussi à nous offrir un portrait psychologique plus poussé. On reste à la surface. C’est frustrant. Par ailleurs, Nicolas Sarkozy n’a pas le traitement qu’impose son destin. L’homme ne parle que de foot et s’empiffre de macarons, que l’auteur nomme ganache, comme s’il s’adressait à Sarkozy, ganache signifiant également imbécile. C’est pour le moins réducteur. Dolisi avoue, il est vrai, avoir prié pour que François Hollande soit élu en 2012. On connaît la suite…
Carla Bruni continue de chanter. Son mari l’accompagne toujours. Quand les lumières de la salle se rallument, Sarkozy devient immédiatement la star. On veut le toucher, lui parler, faire un selfie. Son regard aux aguets, jamais tranquille, magnétise. C’est une rock star. Carla l’a décelé très vite. Ne l’oublions pas en cette période où le pouvoir vacille terriblement.
Marc Dolisi, Un après-midi chez Carla, Robert Laffont.
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