Horreur touristique. Festivus, qui a ravagé le charmant site de Pomfret, dans le Vermont, très prisé à l’automne, refusera par tous les moyens qu’on lui en bloque l’accès.
Dès les années 1980, Philippe Muray pressentait « le chaos festif et touristique » qui allait ravager le monde. La mésaventure de la petite ville américaine de Pomfret, dans le Vermont, confirme une fois encore ses craintes. En automne, cette bourgade bénéficie d’un environnement exceptionnel, nous apprend la journaliste Suzanne Podhaizer : du nord, une petite route serpente « en courbes douces, chacune révélant des champs verdoyants parsemés de moutons ou des étendues de forêts dans lesquelles les feuilles d’automne rouges et oranges s’accrochent aux branches ». Jusqu’à il y a peu, les habitants de Pomfret profitaient égoïstement de la vue de Sleepy Hollow Farm, une propriété privée de 115 acres où s’élèvent, au milieu des collines, de majestueux érables aux feuillages kaléidoscopiques. Le tableau idyllique est aujourd’hui méconnaissable.
Après avoir posté sur leurs réseaux sociaux des milliers de photos de ce magnifique endroit et invité leurs followers à se rendre sur place pour faire à leur tour la photo d’automne, des « influenceurs » ont déclenché un véritable raz-de-marée de touristes saccageant tout sur leur passage, ne respectant ni les propriétés privées, ni les restrictions de circuler sur les petites routes devenues impraticables à cause du trafic généré par les centaines de véhicules déferlant sur l’élégante Cape Farmhouse et ses forêts alentour, se débarrassant de leurs déchets sur le bord des chemins ou déféquant dans les jardins.
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Sous la pression des habitants de Pomfret, les autorités locales ont décidé de fermer les routes menant à la Cape Farmhouse aux non-résidents pendant la haute saison de feuillage automnal. Fureur sur les réseaux sociaux – les « influenceurs » acceptent mal que leur droit à tout bousiller soit entravé : « Amenez tous vos amis et vos campings-cars », a écrit l’un d’eux pour se venger de cette décision municipale. « Le saccage bat son plein comme jamais, écrivait Muray. C’est grâce aux touristes, maintenant, que le ravage se poursuit. » Nous pouvons aujourd’hui ajouter les « influenceurs » à la liste des nuisibles.