Candeloro et Monfort : un mauvais procès


Candeloro et Monfort : un mauvais procès

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« Ah la la la la, je crois qu’il a pris le ballon dans les bijoux de famille, mon cher Jean-Michel ». « Ouh, oui, Thierry, nous ne voudrions pas être à sa place ». « Aaaah, il se relève, plus de peur que de mal, on peut rassurer son épouse ».

On ne sait si cet échange, cent fois renouvelé par les célèbres Thierry Roland et Jean-Michel Larqué ferait aujourd’hui l’objet d’une mise en garde du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel. C’est vrai, quoi, laisser croire qu’une épouse serait fortement inquiète de l’état des organes reproducteurs de son mari, n’est-ce pas sexiste ? Réduire un être humain masculin à sa seule fonction reproductrice, c’est faire preuve d’une misandrie évidente.

Pourquoi cette interrogation ? Parce que le CSA vient d’adresser une ferme mise en garde à France Télévisions pour des propos tenus par Nelson Monfort et Philippe Candeloro qui commentaient les compétitions de patinage artistique des Jeux Olympiques de Sotchi. Le CSA estime « que les propos tenus par ces commentateurs, par leur teneur et leur caractère graveleux portant en particulier sur l’aspect physique de sportives, étaient extrêmement déplacés et que certains d’entre eux étaient même de nature à refléter des préjugés sexistes. ». Que certains commentaires de la part du sémillant Candeloro puissent être estimés graveleux, nous n’en disconviendrons pas. Evoquer ainsi le postérieur et la poitrine de ces dames a davantage sa place aux « Grosses Têtes » de RTL que dans le commentaire sportif. Naguère, alors que Philippe Candeloro ne commentait pas à ses côtés, Monfort savait très bien parler de la plastique avantageuse des patineuses sans forcément tomber dans le graveleux. Mais en quoi évoquer le physique des sportives -dans une compétition où la grâce et l’élégance entrent évidemment en ligne de compte dans le vote des juges- serait « de nature à refléter des préjugés sexistes » ? C’est là que nous rentrons de plain-pied dans ce foutu XXIe siècle où même le Président des Etats-Unis est sommé de s’excuser pour avoir complimenté une dame sur son allure avantageuse. Aujourd’hui, il est donc devenu suspect de dire à une femme -ou d’une femme- qu’elle est désirable. Au pire, cela peut être considéré comme du harcèlement sexuel, au mieux pour de la misogynie et du sexisme. Comme si complimenter ainsi une dame induirait forcément qu’on la réduit aux atouts de ses atours, oubliant qu’elle est aussi un être doté d’un cerveau potentiellement aussi rempli que le nôtre…

On me rétorquera que ce genre de commentaires est réservé aux femmes. Mon œil ! Il suffit de rappeler ce qu’on dit d’Obama, « vachement bien gaulé », les sondages sur les ministres masculins que les françaises aimeraient avoir dans leur lit, ou encore le sort réservé à Laurent Delahousse, journaliste réduit à sa plastique avantageuse aussi bien sur Twitter que dans les sketches de Nicolas Canteloup. Le procès en sexisme intenté à Candeloro et Monfort est donc totalement infondé. La seule chose qu’on puisse leur reprocher, en tant que commentateurs sur les chaînes du service public, serait de manquer de subtilité. Au passage, s’il n’y a plus de blagues lourdaudes, comment les dames apprécieront les évocations subtiles et poétiques ? En tout cas, s’il veut chasser le lourdingue, le CSA va avoir du boulot, et pas seulement dans le commentaire sportif. Avec une échelle des peines cohérente, Jean-Marie Bigard devrait être déféré d’urgence au Tribunal Pénal International pour avoir commis le célèbre « lâcher de salopes ».

Cette mise en garde du CSA est un des symptômes d’un monde médiatique où il est devenu un sport national de demander la tête d’un confrère. En plus de voir du sexisme là où il n’y a que blague potache ou lourdaude, certains petits procureurs au petit pied, souvent aigris, se sont fait une spécialité d’en appeler chaque jour ou presque au CSA, une fois contre Taddéï, une autre contre les réacs censés surpeupler l’espace médiatique, traquant ici et là le « dérapage ». On a beaucoup de mal à s’y habituer mais c’est bel et bien dans ce monde que nous vivons aujourd’hui.

*Photo : REVELLI-BEAUMONT/SIPA. 00671757_000039.



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