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Bretagne : Astérix chez Pôle emploi


Bretagne : Astérix chez Pôle emploi

bretagne bonnets rouges

Astérix est de retour, et pas seulement chez les Pictes ! C’est chez lui, en Bretagne, que l’Armoricain teigneux exerce ses talents de castagneur. Et ce ne sont plus les légionnaires romains qui font les frais de sa colère, mais des CRS et des gardes mobiles qui, pour le coup, doivent regretter leurs douces casernes du « 9-3 ». Sans doute méfiants vis-à-vis des comics depuis Bécassine, les émeutiers du Finistère n’ont pas choisi de coiffer le casque gaulois, mais le bonnet rouge des révoltes de 1675 contre le papier timbré. Un choix somme toute logique : trois cent trente-huit ans plus tard, c’est toujours le ras-le-bol fiscal qui unifie comme par magie smicards, licenciés des abattoirs et agriculteurs prospères de la FNSEA.

Si l’émeute est un moyen comme un autre de se faire entendre, surtout à l’ère des chaînes d’info,  les Bretons font néanmoins fausse route. En réalité, leur problème n’est pas l’écotaxe, mais l’abolition des frontières. Ce n’est pas une gabelle de  quelques centimes au kilomètre de poids lourd qui  empêchera les abattoirs  allemands de truster le marché européen, en payant leurs ouvriers polonais et roumains à coups d’os de jambon.[access capability= »lire_inedits »]

Ces abattoirs qui, s’il y a un jour un SMIC en Allemagne, se délocaliseront dans le grand Est européen, sans oublier de toucher quelques dizaines de millions bruxellois au passage. Ce ne sont pas non plus les jambons espagnols ou italiens de qualité, les Pata Negra et autres San Daniele, vendus de 80 à 200 euros le kilo, qui risqueraient de souffrir de cette minuscule ponction sur leurs marges. Mais quand on fabrique à la chaîne du jambon à moins de 2 euros le kilo, comme a choisi de le faire une Bretagne hypnotisée par la chimère productiviste, on se retrouve le couteau sous la gorge au moindre changement, même infime, de réglementation. Qui vit par le prix périt par le prix.

Cette agriculture, qui a bénéficié plus qu’aucune autre en France de la manne de l’Union européenne depuis cinquante ans, se réveille citrouille. La Bretagne a, pendant un demi-siècle, prospéré grâce à la PAC. Pas étonnant que cette région ait massivement adhéré au traité de Maastricht (59,86 % contre 51,04 % au niveau national), contribuant pour moitié à la courte victoire de la monnaie unique. Pas étonnant encore qu’à l’exception des Côtes-d’Armor, les départements bretons aient voté massivement « oui », à rebours des autres campagnes françaises, au référendum de 2005. Pas étonnant enfin que, depuis 1983, les scores du FN, malgré l’ancrage local de la famille Le Pen, y aient toujours été très inférieurs à la moyenne nationale.

Pendant des décennies, grâce au lobbying puissant de Breizh-Europe, installé depuis toujours à Bruxelles, les aides européennes ont réglé bien des problèmes.

Mais aujourd’hui le vent a tourné, et les subsides communautaires, tels les cumulo-nimbus, se déplacent inéluctablement de l’arc atlantique vers l’est du continent. Une inversion en amenant une autre, depuis 2012, la progression du parti du retour au franc est spectaculaire en Bretagne, surtout – fait nouveau – dans les zones rurales.

Nos confrères de Rue89 avaient consacré, en avril 2012, un dossier militant mais bien documenté à « La Bretagne, terre de résistance à l’extrême droite ». Mais ça c’était avant. Maintenant que Bruxelles a coupé le robinet de la potion magique, les Bretons sont redevenus des Français comme les autres : ils attendent leur salut de l’État-nation. Monsieur le Président, quelques piécettes dans mon bonnet rouge…[/access]

Novembre 2013 #7

Article extrait du Magazine Causeur



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