Aussi discret que surpuissant, le PCC et une organisation criminelle qui fait régner sa loi au Brésil. Cette mafia en pleine croissance, qui jongle avec les dollars et les tonnes de poudre blanche, commence à s’implanter en Europe. Reportage à São Paulo.
Elle s’appelait Luana, elle avait les yeux noirs, les cheveux longs et bouclés, la peau foncée, d’un noir caramel qui hésitait entre les Indes et l’Afrique. Vingt ans tout au plus, le sourire délicat et triste d’une princesse déchue. Je l’ai trouvée en me perdant. Elle tenait un petit bar sur le bord de la route où je me suis arrêté pour demander mon chemin à la tombée de la nuit. J’avais quitté l’autoroute trop tôt et n’arrivais plus à rebrousser chemin, désorienté par les arbres gigantesques qui avançaient en rang serré sur la route et impressionné par les favelas qui métastasaient à flanc de colline. Elle leva les yeux du téléphone, prit un papier et me fit un dessin. Puis, elle m’accompagna jusqu’à ma voiture pour s’assurer de mes premiers pas. Devant ma nervosité évidente, elle me glissa : « Il ne t’arrivera rien ici, personne ne veut d’histoires avec le parti, tu peux rouler tranquille la fenêtre ouverte, c’est probablement l’endroit le plus sûr de São Paulo ».
Le parti, c’est le PCC, Primeiro Comando da Capital, la principale organisation criminelle brésilienne, forte de 40 000 hommes et capable d’agir aux quatre coins du Brésil. Une armée privée qui prend ses ordres depuis les centres pénitenciers de haute sécurité où sont incarcérés ses principaux dirigeants, dont le terrible Marcos Willians Camacho alias Marcola, condamné à 342 ans de prison.
Originaire de São Paulo, cet ancien dealer sans envergure peut être fier de lui. En 1993, il a fondé le PCC pour défendre des prisonniers contre les abus de l’administration. Désormais, il préside aux destinées d’une multinationale dont le chiffre d’affaires annuel avoisine le milliard de dollars, selon les estimations de Lincoln Gakiya, procureur de l’Etat de São Paulo en charge de la lutte contre le crime organisé.
« Le PCC est désormais une mafia au sens plein du terme, tout comme la Ndangreta italienne ou les Yakuzas japonais, il sait laver l’argent de la drogue et dispose d’une organisation extrêmement sophistiquée où chacun obéit à une discipline rigide et implacable », explique-t-il. Les membres du PCC paient une cotisation mensuelle, en contrepartie de la promesse d’une assistance juridique en cas d’inculpation et d’une protection physique en cas d’incarcération. « Le PCC connaît
