En ces jours de gloire où nous n’en finissons pas de passer de l’ombre à la lumière, il y a tant de bonnes nouvelles que certaines ont pu vous échapper. Je tiens donc à vous annoncer, chers lecteurs et surtout chères lecteures, que pour les femmes, l’avenir radieux c’est maintenant.
Tout d’abord, le président de la République a ressuscité le ministère des Droits des femmes créé par François Ier, dit Mitterrand – puis réduit à un secrétariat d’Etat par le même lors de son second mandat. Alleluiah ! Il faut dire que François Hollande n’avait pas vraiment le choix: il s’y était engagé et, il faut lui rendre cette justice, il semble décidé à vouloir tenir ses promesses, même les plus incongrues. Ainsi le gouvernement est-il strictement paritaire, enfin, si on ne compte pas le Premier ministre, mais ne soyons pas chiens – ni chiennes. La malicieuse Fleur Pellerin, qui ne manque visiblement ni de cran ni de neurones, a innocemment remarqué que si elle avait été un homme blanc et sexagénaire, elle n’aurait sans doute pas été recrutée. Nul n’a relevé cette insolence, sans doute parce qu’on pardonne tout à une jolie femme.
De fait, si on cumule les critères « femmes et diversité », le casting de François Hollande est encore plus réussi que celui de Nicolas Sarkozy. Christiane Taubira sera probablement moins performante que Rachida Dati comme ambassadrice de la mode française, mais à en juger par ses débuts, elle a des chances de l’égaler comme gaffeuse de compétition. Peut-être est-elle déjà coupable d’avoir aggravé la calvitie présidentielle : le Président a dû s’arracher les cheveux en entendant sa garde des Sceaux sortir du tiroir où il aurait dû rester son vague engagement de supprimer les tribunaux correctionnels pour les mineurs récidivistes âgés de 16 à 18 ans. Alors que la gauche doit prouver qu’elle a rompu avec le laxisme et l’angélisme des temps anciens, l’idée de renvoyer des gaillards qui pourrissent la vie de leurs concitoyens devant le tribunal pour enfants (qui leur infligera des « rappels à la loi » qui feraient rigoler un nourrisson) relève soit de l’inconscience, soit du sabotage. Passons. Après tout, les femmes ont aussi le droit de faire des conneries.
Quoi qu’il en soit, François Hollande a fait comme il avait dit : nous avons notre quota de ministres en jeans, enfin en jupons – je sais, c’est sexiste. Qu’il ne s’estime pas quitte pour autant. Comme disait ma grand-mère, il n’a fait que la moitié de son devoir. Et comme dit Alain Resnais, vous n’avez encore rien vu. Dans un manifeste publié quelques jours avant l’élection et intitulé « les droits des femmes passent par la gauche », une théorie de personnalités des deux sexes lui rappelait ses engagements. « La gauche, pouvait-on y lire, est une alliée intrinsèque de la lutte des femmes pour leur libération parce qu’elle a pour but l’émancipation de chaque individu. » La droite ayant pour objectif l’oppression des faibles et l’exploitation des pauvres, on comprend que les cinq années écoulées aient été un enfer pour les femmes qui ont, paraît-il, « payé le prix fort des mesures libérales mises en œuvre par Nicolas Sarkozy ». Heureusement, les signataires seront là pour aider François Hollande à « lutter contre le patriarcat, et le bousculer si les vieux démons reprennent le dessus ». À mon avis, si le Président avait des rêves de patriarcat, sa « girl-friend » les lui ferait passer vite fait, mais pardon, ça c’est la vie privée.
L’important, c’est que cette bonne volonté ait été récompensée. J’apprends donc avec ravissement, grâce au camarade David Desgouilles, que l’autrice de ce manifeste, Caroline de Haas, fait partie du cabinet de Najat Vallaud-Belkacem[1. Mais non, ce n’est pas grâce à David Desgouilles que notre copine Caroline officie désormais pour la République, c’est grâce à lui que je le sais !]. Pour les distraits, Caroline de Haas dirigeait jusque-là un groupuscule appelé « Osez le Féminisme ». Outre le grand progrès que constitue la suppression de la charmante appellation « Mademoiselle », « Osez le Féminisme » a été particulièrement en pointe sur trois fronts: le partage des tâches ménagères, le lynchage de DSK et la réhabilitation du clitoris. Comme il est peu probable que le prochain parlement vote une « loi clito » et que la justice et les médias se débrouillent très bien pour imputer à DSK les crimes les plus abominables, il faut s’attendre à ce que nos députés votent très vite une « loi plumeau » assortie de peines-planchers pour les mâles un peu mollassons du balai. Chers amis hommes, il ne faudra pas en vouloir au Président. Tenir tête à Angela Merkel, c’est fastoche. Mais des hommes capables d’affronter une fille qui placarde des clitoris géants sur les murs de nos villes, moi je n’en connais pas.
*Photo : Caroline de Haas, Parti socialiste
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