L’affaire Gayet déclenchée par les révélations de Closer a remis à l’ordre du jour la sempiternelle question de la vie privée des personnages publics, notamment celle des dirigeants politiques. Comme toujours, le débat est faussé par un malentendu, la plupart des gens envisageant la question comme un enjeu moral. Autrement dit, on fait mine de se demander si un dirigeant politique de premier rang a le droit de bafouer la morale bourgeoise en ayant des relations extraconjugales. La question étant ainsi posée, la réponse semble aller de soi : un dirigeant politique, en l’occurrence, le président de la République, a le droit d’avoir la vie sexuelle et sentimentale de son choix sans que ces frasques se retrouvent étalées sur la place publique. D’autant que la tradition française s’oppose au puritanisme anglo-saxon.
Or, les questions posées dépassent largement la sphère morale. En réalité, nous avons le droit de savoir sur la vie de notre président certaines choses qui ne nous regarderaient pas s’il s’agissait d’un citoyen lambda ou d’un « people ».
Dans ce cas précis, les problèmes soulevés, tombant tous dans le domaine du « droit de savoir » du public, sont multiples. D’abord, il est question du statut de la Première Dame de France – fonction quasi-officielle. Ensuite, même si la première dame était l’épouse de longue date et la mère des enfants de chef de l’Etat (des éléments renforçant son statut de première dame comme jadis Mme Mitterrand) il est important, à un moment ou un autre, de connaître l’autre femme du président afin d’éviter les soupçons de népotisme ou de conflits d’intérêts.
Enfin, n’oublions pas la question de la sécurité du président qui – sans conclure à une erreur de la part des services compétents – se pose également, de même que l’identité des locataires ou propriétaires de l’appartement où les supposés rendez-vous étaient organisés. Autant d’interrogations légitimes car leurs réponses peuvent mettre à mal l’autorité, la sûreté et la probité du chef de l’Etat. Rappelons que dans une autre affaire récente, tous les journalistes se polarisaient sur les détails des parties fines avec des prostituées, au risque de passer à côté du vrai problème, à savoir l’identité et les intérêts de celui qui les finançait.
Bref, quelles que soient les motivations de Closer et la véracité factuelle de ses allégations, on peut difficilement qualifier ces histoires de simples commérages et en nier l’intérêt politique. Reste une dernière question : que reste-t-il de la vie privée d’un président de la République ? À vrai dire, pas grand-chose. Peut-être la couleur de ses slips.
*Photo : MEIGNEUX/SIPA. 00658539_000001.
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