À une terrasse de Saint-Germain-des-Prés, un après-midi de mai, deux romancières parlent de leurs déboires professionnels. « Je les préfère petites mais fermes sur les principes, j’en ai ma claque des grosses mollassonnes qui promettent beaucoup et donnent peu en retour », affirme l’une d’entre elles. « Ma chère, l’édition parisienne n’a rien dans le pantalon. L’orgasme est à chercher dans nos provinces. Le terroir, plutôt que la rive gauche ! Je pense prendre le maquis à la rentrée de septembre », lâche l’autre, mécontente de ses derniers chiffres de vente.
Aujourd’hui, ce ne sont plus les mastodontes de l’édition qui font briller les yeux des écrivains, mais les petites maisons au goût sûr, suivies par la critique, chouchoutées par les libraires, et dont les lecteurs succombent autant par snobisme que par déception amoureuse.[access capability= »lire_inedits »] Tels des amants trompés, les acheteurs de romans ou d’essais en ont assez de se faire avoir à chaque saison par des grands noms et d’illustres éditeurs. Alors ils se tournent vers des structures à taille humaine, hors du système et des compromissions du milieu. On fait plus confiance aux artisans locaux qu’aux géants de la distribution. Les succès du printemps le prouvent, ils sentent les embruns et l’herbe coupée.
À Bordeaux, Finitude a dépassé les 100 000 exemplaires de son En attendant Bojangles d’Olivier Bourdeaut, un inconnu qui fait désormais chavirer le cœur des lectrices de moins de 50 ans. Sur les salons, les Orsenna, Van Cauwelaert et Foenkinos l’ont mauvaise. À Sainte-Marguerite-sur-Mer, sur la Côte d’Albâtre, Olivier Frébourg construit patiemment son catalogue avec le sens du coup médiatique et de la découverte. Les éditions des Équateurs cassent la baraque en ce début d’année avec les ouvrages de Jean-Paul Kauffmann et d’Ariane Chemin. On pourrait ajouter à ce tour de France du compagnonnage littéraire le Castor Astral en Aquitaine ou L’Atalante à Nantes. Leur point commun : des éditeurs qui produisent peu mais bien. La capitale n’est pas en reste, Rue Fromentin affole les compteurs avec Meg Wolitzer et soutient le talentueux Patrice Jean. Quant à Pierre-Guillaume de Roux, il tient lieu de refuge aux réprouvés Richard Millet, Alain de Benoist et Ivan Rioufol.
Jeunes auteurs, un conseil, si vous cherchez la célébrité, préférez les maisons de qualité aux usines à livres ![/access]
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