Les conservateurs menés par Boris Johnson viennent d’obtenir la majorité absolue lors des élections législatives britanniques, selon les résultats officiels publiés ce vendredi. Un événement qui aura des répercussions en Europe… voire ailleurs.
Le Premier ministre britannique est assuré d’au moins 358 sièges à la Chambre des communes – une large majorité – alors que les Travaillistes de Jeremy Corbyn descendent de 262 à 203 sièges. Tôt ce vendredi matin Boris Johnson s’est félicité d’avoir obtenu « un nouveau mandat fort pour réaliser le Brexit ». Et, comme il l’a promis, ce sera avant le 31 janvier 2020 (avec les Rois Mages) car tout est prêt, depuis longtemps : des centaines de juristes ont préparé le plan législatif et la loi sur la sortie de l’Union européenne (“Withdrawal Agreement Bill-WAB”, 110 pages, plus les milliers d’annexes). Ce plan qui traite de tous les aspects de la rupture a déjà été voté en octobre dernier (par 329 voix contre 299) en vue d’adapter le droit britannique au nouveau rapport avec l’Union européenne, qui va en découler. Ce plan Johnson a déjà été approuvé à l’unanimité par les 27 pays (y compris l’Eire) à la mi-octobre. S’agissant des relations commerciales Grande-Bretagne/continent, il est prévu « un accord de libre-échange ambitieux avec zéro droits de douane et quotas entre l’UE et le Royaume-Uni ». des modèles douaniers européens éprouvés ne manquent pas, de l’AELE à l’EEE.
Corbyn indigne
Quelques enseignements peuvent être tirés de cet événement décisif. En premier lieu, le peuple britannique est très majoritairement en faveur du Brexit et l’idée de Corbyn d’axer sa campagne sur un nouveau référendum au sujet du Brexit était indigne démocratiquement (on ne revote dans une vraie démocratie) et politiquement stupide. Car si les médias officiels ont délibérément aveuglé une frange bruxellophile, très minoritaire, de l’opinion, les manifestations des »remainers » étaient largement manipulées par des officines, depuis l’étranger. Or en démocratie on ne manifeste pas contre le résultat d’un scrutin. Mais il y a bien désormais une question nationale écossaise, car le Scottish national Party a obtenu un très bon résultat dans ses terres gaéliques. Johnson aura gérer cette dimension difficile et assez inattendue de ce scrutin historique. Avec la question catalane une autre épine européenne.
En second lieu, qu’est-ce qui va changer pour la France ? Peu de choses. Pour les marchandises il y a belle lurette que les contrôles de conformité des produits exportés se font sur leur lieu de départ et les contrôles douaniers sont seulement documentaires et aléatoires lors du transport et de la livraison. Au demeurant, le Royaume-Uni va conserver, pendant longtemps sans doute, les acquis réglementaires communautaires sur la qualité des produits : pourquoi changerait-il les règles en vigueur ? La France, elle, continuera à exporter de façon très rentable vers le Royaume ; mais on peut craindre que la jungle de Calais ne s’accroisse démesurément : le pont-levis anglais sera relevé et nous pâtirons plus que jamais du « délire immigrationniste » bruxellois. Car le Royaume reprendra vite sa liberté, notamment en matière d’harmonisation juridique, fiscale et sociale, de pêche, de politique étrangère et migratoire…
Bruxelles chancèle
En troisième lieu, le système de Bruxelles (issu des traités Maastricht et de Lisbonne) est sérieusement remis en cause. Pourra-t-il se perpétuer alors que les colères bouillonnent et ne cessent d’enfler contre lui partout en Europe : en France, Italie, Grèce, Hongrie, Espagne, et même Allemagne ? En effet, il faut pas confondre ce système a-national et donc a-démocratique, centralisateur, ultra libéral, mondialiste, financiariste, immigrationniste, avec la belle idée d’Europe.
Le Brexit ouvre donc un espoir aux Européens sincères. Car contrairement à ce que jacassent médias en boucle et politiciens aux ordres, il existe bien sûr un plan B pour rebâtir une autre Europe, démocratique, consensuelle, de bas en haut et plus jamais de haut en bas. À l’avenir – et sans remettre en question les acquis communautaires – les peuples souverains choisiront librement ce qu’ils veulent faire ensemble, ou pas. Il existe nombre de projets de nouveaux traités permettant d’unir enfin toute la famille européenne, sans exclusion, ni domination, ni autodestruction.(v.par exemple celui de la Fondation Res publica ou nos travaux personnels).
La planète espère…
Enfin, en quatrième lieu, Gilets jaunes et Brexit sont un signal fort à la planète : les USA se libèrent des contraintes des traités multilatéraux (OMC, TAFTA, Tanspacifique) ; Français, Italiens, Algériens, Tunisiens, Soudanais, Libanais, Chiliens, Hongkongais demandent liberté politique et dignité économique. La petite Europe – ce cap avancé de l’Asie pour Paul Valéry – a toujours su proposer un modèle humaniste au monde. Or, toute la planète souffre des mêmes maux : libre-échangisme commercial, finance spéculative, immigration de masse, terrorisme, pollution, paupérisation ; et souvent restrictions ou transferts démocratiques.
La planète attend un nouveau modèle politique et social. Les penseurs européens sauront-ils renouer avec le génie de leurs grands prédécesseurs et proposer une voie vers une humanité démocratique, juste, et pacifique ?
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