Alors qu’Elon Musk veut emmener le transhumain sur Mars, le plus riche des Français a fait fortune en aidant l’Homme à mieux vivre sur Terre.
“X Æ A-XII”. Ceci n’est pas un code de mise à feu de l’arsenal nucléaire américain, mais le prénom donné par l’homme le plus riche du monde à son fils, né l’an dernier. Elon Musk, célébrissime patron du constructeur automobile Tesla et de l’agence spatiale privée Space-X, n’en finit plus de faire parler de lui. Il lui suffit désormais d’éternuer (ou presque, de tweeter), pour que les cours de la Bourse ou du Bitcoin flambent ou s’effondrent.
Avec une fortune évaluée à plus de 188 milliards de dollars en janvier dernier, cet homme de 49 ans au visage poupin a laissé entendre qu’il en verserait la moitié à des œuvres de charité. Mais pas tout de suite. Plutôt “dans vingt ans, quand Tesla sera stabilisée”, confiait-il en 2018. Pour l’heure, ses investissements se concentrent sur la colonisation de Mars et l’implantation de puces électroniques dans le cerveau humain.
Jusqu’à preuve du contraire, un sac à main rend la vie plus agréable que la réservation d’un séjour sur Mars en 2050
Avec son projet Neuralink, l’apprenti sorcier compte en effet soigner les addictions, la dépression ou l’insomnie, et même supprimer la peur. Pour l’instant, les expériences sont réalisées sur des cochons mais demain, il le promet, l’homme aura “une montre connectée dans le crâne”. À moins qu’une pandémie mondiale ne vienne contrarier ses plans et retarder l’avènement de la créature surhumaine censée nous remplacer…
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Pendant ce temps, le PDG du géant du luxe français LVMH, lui, continue de passer pour un “salaud de riche”. Au pays de la CGT, Bernard Arnault demeure encore et toujours la tête de Turc d’un certain nombre de nos concitoyens. Pour eux, son patronyme est presque devenu un nom commun : celui du méchant milliardaire, dont l’indécente fortune devrait être confisquée et redistribuée d’urgence.
Et pourtant. LVMH n’investit pas dans la pseudo-révolution transhumaniste, mais dans le plaisir ici et maintenant. Ce fleuron de l’économie frenchy produit des articles d’une qualité exceptionnelle, que l’on acquiert “pour la vie” et qui se transmettent de génération en génération. Aux antipodes des lubies scientistes de l’époque, le luxe à la française ne promet pas une vie meilleure demain ou ailleurs, mais ici et maintenant.
Vuitton, Moët-Hennessy, Guerlain, Fendi, Céline, Chaumet, Bulgari… la collection de marques acquises par le redoutable homme d’affaires fait rêver. Mais en gardant les pieds sur Terre. Jusqu’à preuve du contraire, un sac à main élégant et inusable rend la vie plus agréable que la réservation d’un séjour sur la planète rouge en 2050. Car encore faudrait-il que l’on soit vivant et à peu près valide le jour du départ.
La différence entre un savant fou post-humaniste américain et notre baron industriel à nous, c’est que le second semble avoir conscience de nos limites. “Tant que le problème crucial des inégalités ne sera pas traité, d’autres objectifs et d’autres désirs resteront hors de portée », indique une note communiquée à l’équipe de Joe Biden par un groupe de personnalités réunies autour du PDG de JP Morgan.
« Les dirigeants économiques doivent prendre conscience du fait qu’ils n’ont pas seulement une obligation économique mais aussi un intérêt commercial à promouvoir un système plus juste et plus équitable”, indique également le document. Or l’un de ses co-signataires – parmi lesquels figurent Tony Blair, Condoleezza Rice, Henry Kissinger ou encore le vice-président du géant chinois Alibaba – n’est autre que notre Bernard Arnault national.
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Quoi qu’on pense de sa pratique du capitalisme financier, chacun sait qu’Arnault est aussi un amoureux des arts, auxquels il a dédié la fondation Louis Vuitton. On sait peut-être moins que LVMH a largement participé à “l’effort de guerre” contre la Covid, que ce soit en finançant un important essai clinique mené par l’Institut Pasteur de Lille, en achetant des dizaines de millions de masques, ou en réorientant son activité vers la production de gel hydroalcoolique pour les soignants.
On ignore encore plus souvent l’existence du programme d’apprentissage d’excellence de LVMH, qui soutient l’emploi des jeunes sans qualification à l’heure où l’on parle de “génération sacrifiée”. Et l’on oublie parfois que, face à la crise sanitaire qui venait, Bernard Arnault annonçait dès le printemps dernier renoncer à deux mois de son salaire de PDG et à toute rémunération variable pour 2020. Bien le minimum ? On conviendra que tous les puissants de ce monde n’en font pas autant.
Quant au fils de Bernard Arnault, son prénom est Antoine. Responsable de la communication et de l’image du groupe LVMH, c’est lui qui a repéré sur Twitter l’appel aux dons lancé l’an dernier par l’Institut Pasteur de Lille. Ce mois-ci il se dit “fier” d’avoir contribué en tant que mécène, à hauteur de 5 millions d’euros, à la recherche d’un traitement contre le coronavirus, qui devrait être disponible cette année. Ce n’est pas Mars, ce n’est même pas la Lune, mais c’est déjà ça.
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