Ça devait arriver! Après l’« homophobie » et les « chansons pornographiques », la « vie dissolue » et les « appels à l’émeute », nous voilà carrément accusés d’escroquerie en couple organisé. Deux « grands-bourgeois » profiteurs, qui n’hésitent pas à pratiquer la fraude au logement social au détriment des plus défavorisés. Coucou c’est nous !
Tout a commencé l’hiver dernier avec une rumeur de « magouille immobilière ». Lancée sur des blogs, reprise par Marianne, alimentée par le Nouvel Obs et relayée un peu partout, elle visait une accusation bien précise : les « passe-droits » grâce auxquels nous occuperions illégitimement « deux appartements à bas prix dans un HLM. »
Désolés, mais le contentieux qui nous oppose aujourd’hui à notre bailleur, la Régie Immobilière de la Ville de Paris, n’a rien à voir. Il porte sur la domiciliation à notre adresse de la société Jalons.
Ça n’a pas empêché la charge médiatique de se généraliser, contre « ces profiteurs qui entendent donner aux autres des leçons de morale… »
Nous voilà soudain en Corée du Nord : parmi la centaine d’articles consacrés à notre « cas », aucun ou presque n’ envisage un instant l’hypothèse de notre bonne foi.
Avant le jugement, les préjugés
Au mieux, les moines copistes en mal de copie se sont contentés de reproduire, sans autre forme de procès, les accusations portées contre nous. Mais la plupart des médias, toujours aussi respectueux de la présomption de culpabilité, ont préféré bricoler leur propre dossier à charge – quitte à mélanger allègrement l’ « affaire Jalons » avec tous les ragots colportés ici et là sur notre « luxueux HLM low cost » et autres escroqueries immobilières putatives.
Bref l’affaire est entendue avant même d’avoir été jugée : nous sommes, en plus du reste, des aigrefins !
Calmons-nous, et tâchons de résumer notre réponse à un Jeu des 4 ou 5 erreurs. Les plus grosses commises à notre endroit par une presse copieuse-colleuse, voire rapporteuse.
1 – Non, nous n’habitons pas une HLM, mais un « logement locatif intermédiaire à loyer libre » de la Ville de Paris, naguère appelé « ILN » (Immeuble à Loyer Normal).
2 – Oui, nous sommes « éligibles » à ce type de logement intermédiaire, et la RIVP l’a encore confirmé l’an dernier. Au vu de notre feuille d’impôts, elle nous a même exemptés – sans pression de la part de Jacques Chirac – d’une hausse de loyers applicable au-dessus d’un certain seuil de revenus. Simplement, nous ne l’atteignons pas.
3 – Oui, notre déclaration d’impôts est sincère, contrairement à ce que croassent certains articles en forme d’appels au contrôle fiscal. L’attaque se fait en deux temps : 1) Leur loyer est scandaleusement bas ; 2) Mais comment font-ils pour payer autant avec d’aussi maigres revenus déclarés ? Ces gens-là auraient un compte chez Cahuzac & Co que ça ne nous étonnerait pas… Mais qui sommes-nous pour juger ? Nous dénonçons, c’est déjà bien.
Ils ont un compte chez Cahuzac, ou quoi ?
4 – Hélas, la situation financière de notre couple est loin d’être aussi brillante. Virginie, sans emploi depuis qu’elle est devenue « opportuniste », comme dit Karl Zéro, ne survit qu’en rognant tous les mois sur le capital hérité de ses parents. Quant à Bruno, « nègre » affranchi par Pasqua il y a vingt ans déjà, il reste un prolétaire de la plume.
5- Oui, nous occupons deux appartements, et alors ? C’est un choix de vie personnel. Chacun est encore libre de décider ce qu’il fait de son argent. Certains mettent tout dans les bagnoles, les restos, les voyages, Johnny ou Kandinsky… Pourquoi pas le logement ?
Le principal danger, pour les couples qui ont l’ambition de durer (surtout à notre époque, comme disait Emma Bovary), c’est l’érosion du quotidien.
Pour nous, garder chacun son appartement après le mariage, s’imposait comme remède homéopathique contre le divorce. Même après l’arrivée des enfants et la transformation des deux appartements en duplex, nous avons conservé nos boudoirs.
L’air de la calomnie
Il est toujours préférable de passer ensemble du « temps choisi », comme on dit, plutôt que le temps imposé par la configuration des lieux. Et en cas d’escalade verbale, mieux vaut pouvoir se retirer chacun dans ses appartements avant d’en venir aux mains…
Bien sûr ça a un prix, mais le divorce aussi. En tout cas, on voit mal d’ailleurs comment des journalistes pourraient nous reprocher un mode de vie minoritaire et même non-conformiste – que pourtant notre bailleur n’a jamais remis en cause.
Avec tout ça, une petite dent nous a poussé contre « la presse » au sens vulgaire du terme. Celle qui a surfé complaisamment sur la vague des calomnies foireuses, jusqu’à faire de nous des sortes de Thénardier, en plus riches.
Frigide n’apprécie guère, mettez-vous à sa place ! Ce que le lecteur moyen est censé retenir, c’est qu’elle déshonore son combat public par sa conduite privée. Quant à Basile, il est vexé, et pour cause : en le traitant d’escroc, on l’accuse en plus d’être un raté !
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