Faut-il croire Bachar el-Assad ? Certes, le troisième discours du président syrien sonne comme un best of des deux précédents : le « grand dialogue national », les condoléances aux familles de martyrs (il ne manque pas d’air) et l’engagement solennel d’écraser les «gangs armés» et le fameux « complot de l’étranger »… Mais en même temps, Assad innove un peu et promet des élections en août (donc pendant le ramadan) et des réformes en septembre… On est un peu perplexe et comme Daoud Boughezala, on se demande s’il ne vaut pas mieux regarder ce que fait Maher plutôt qu’écouter ce que dit son frère aîné Bachar…
En Turquie, grande voisine et –géostratégie oblige– acteur clé de la crise syrienne, on n’a pas hésité : Bachar el-Assad était encore en train de savourer ses applaudissements que le communiqué d’Ankara était déjà diffusé par les agences de presse : Ersat Hurmuzlu, conseiller du président turc, Abdullah Gul, a accordé au président syrien une petite semaine avant « une intervention extérieure ». Ni septembre, ni août : la semaine prochaine et en espèces !
En clair, Erdogan commence à en avoir marre de son « ami », et si Bachar ne bouge pas rapidement et radicalement, la Turquie se sentira autorisée à ne plus respecter la souveraineté syrienne et ses forces armées établiront une zone tampon le long de la frontière où les réfugiés seraient à l’abri de la répression. Autrement dit, Ankara deviendrait garant de la sécurité des Syriens se réfugiant sur leur propre territoire à cause des exactions de leur propre gouvernement…
Les Turcs comprennent parfaitement qu’une telle situation risque de dégénérer en conflit (comment réagir si les services syriens procèdent à des arrestations parmi les réfugiés massés du côté syrien de la frontière ?) mais croient pouvoir le contenir.
Et surtout, quels que soient les risques encourus, on sent bien que l’envie démange très très fort Erdogan, un an à peine après l’arraisonnement Mavi Marmara, de s’inviter à nouveau dans le kriegspiel proche-oriental, histoire de démontrer au monde entier, et plus spécialement aux Européens, à quel point il est indispensable…
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