Avoir une mère viennoise comporte quelques avantages, notamment celui d’avoir pu lire Karl Kraus à l’âge où mes camarades lausannois s’emballaient pour Albert Camus ou Jean-Paul Sartre. Karl Kraus leur était totalement étranger, alors qu’il coulait dans mon sang.
J’ai appris très vite grâce à lui que si « la représentation de la femme est confortable », « sa réalité l’est beaucoup moins. » J’aime bien monologuer avec une femme, disait-il, mais je trouve plus stimulant de dialoguer avec moi-même. »
J’avais déjà observé que la plupart des femmes aiment rêver des hommes sans coucher avec eux. Il conseillait d’attirer expressément leur attention sur le caractère impossible de ce projet, ce qui m’a valu quelques déboires.
Mais ce qui m’a le plus marqué est le caractère incroyablement profond de cette réflexion : « Les femmes sont souvent un obstacle à la satisfaction sexuelle, mais de ce fait érotiquement exploitables. « Il m’a fallu des années pour le comprendre et le mettre en pratique ».
J’en profite pour remercier Pierre Deshusses de nous livrer une nouvelle version française des Aphorismes de Karl Kraus qu’il a traduite et préfacée dans l’excellente Bibliothèque Rivages dirigée par Lidia Breda.
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