Avec Art contemporain. Manipulation et géopolitique, Aude de Kerros s’attaque a un milieu qui souffre aussi bien de l’ingérence de l’État que de l’influence disproportionnée d’un petit nombre de collectionneurs. D’où le désamour du public pour un art devenu un produit financier comme un autre.
Dans les premières décennies de l’après-guerre, Paris, métropole mondiale des arts, est évincée par New York. À la stupéfaction générale. Pour Aude de Kerros, cette évolution/rupture n’est pas le simple résultat du cours naturel des choses, mais le produit du volontarisme américain, ses fondations et ses agences. Dans le contexte de la guerre froide, l’objectif est de contrer l’influence intellectuelle communiste en plaçant au premier plan l’art moderne américain, pourtant encore peu populaire dans son propre pays. Ses formes inédites, qui font figure de marqueurs du monde nouveau, contrastent avantageusement avec la ringardise du réalisme socialiste. La géopolitique artistique dont parle Aude de Kerros ne passe pas par la canonnière, mais elle n’exclut pas l’intervention des États.
Paris joue contre son camp
Le dynamisme du marché de New York suffit bientôt à assurer la prépondérance américaine. C’est alors que la France, dans les années Lang, devient à son tour interventionniste. Malheureusement, la méthode s’avère contre-productive. La raison en est, selon l’auteure, que les fonctionnaires de la Culture sont fascinés par le voyage à New York. Ils sont, en revanche, réservés, voire méprisants à l’égard de nombreux créateurs hexagonaux
