En précisant qu’il n’entendait pas en faire une « arme politique ou culturelle », Gabriel Attal a défendu la laïcité lors d’un déplacement au Canada. « J’ai affirmé un attachement très fort, qui est celui de la France, à la laïcité. Nous avons cette même approche en partage », a déclaré vendredi le Premier ministre français lors d’une conférence de presse avec le Québécois François Legault.
En déplacement dans la Belle Province, le Premier ministre n’a pas crié « Vive le Québec libre !» comme le Général de Gaulle en 1967 mais il a vanté la laïcité, modèle que France et Québec ont selon lui en partage. En réalité, la laïcité québécoise est beaucoup plus souple que la nôtre – pour ne pas dire molle. La Loi 21 (votée en 2019) interdit là-bas le port de signes religieux aux seuls agents de l’Etat. Et pourtant, elle suffit à exaspérer le reste du Canada. Les nôtres ulcèrent le reste du monde.
La laïcité partout et nulle part
En France, la laïcité est indissociable de l’histoire de la République (« laïque » est d’ailleurs le septième mot de notre Constitution). On aime penser que la laïcité est l’arme fatale contre l’islamisme et le séparatisme. Dès qu’un problème survient, c’est-à-dire quotidiennement désormais, on dégaine le mot magique: nous avons des référents laïcité, des cours de laïcité, il y a des prix laïcité, une Journée de la laïcité dans la Fonction publique. En Occitanie, Carole Delga crée un Conseil régional de la laïcité. Bref tout le monde est laïque !
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Visiblement, cela n’impressionne pas les Frères musulmans et autres propagandistes de l’islamisme d’atmosphère qui imprègne à des degrés divers une majorité de jeunes musulmans – massivement hostiles à la loi de 2004.
Faut-il en conclure que la laïcité est dépassée ?
Non. À condition de s’entendre sur ce qu’elle est.
Si le mot est très galvaudé, la laïcité est un régime juridique et un esprit qui demandent aux religions ou aux identités particulières de céder devant la loi commune et l’identité nationale et d’être discrètes dans l’espace public.
Or, le progressisme voudrait accommoder la laïcité à la sauce multiculti. En faire un concept aussi sucré, gentillet et inopérant que le « vivre-ensemble ». Il dénonce ainsi en permanence une laïcité de combat qui serait « islamophobe ». Cette idéologie McDo (« Venez comme vous êtes ») est très puissante chez les professeurs et les jeunes. Tous les sondages convergent et doivent nous alarmer. Selon les chiffres de l’IFOP et de la Licra, 52 % des lycéens sont favorables au port des signes religieux (contre 25 % dans la population générale). Ce chiffre monte même à 76% chez les lycéens qui se disent musulmans. Pire, la même proportion – 52% – est hostile au droit de critiquer les religions. Autrement dit, ils voudraient rétablir le délit de blasphème. Voilà qui est très grave : c’est une manière d’introduire en France de nouvelles mœurs, de nouvelles normes et de les imposer d’ailleurs aux musulmans. Le blasphème commence avec une petite sœur qui ne se voile pas ou parle aux mangeurs de cochon…
La laïcité n’est pas une arme politique ou culturelle, a précisé Gabriel Attal à Québec. Eh bien si ! Et il est temps de s’en servir. Et de proclamer qu’en France, la laïcité, ce n’est pas le « respect » des religions comme on l’entend dire partout bêtement. C’est le droit de s’en moquer, ou comme le dit l’avocat Richard Malka, le droit d’emmerder Dieu.
Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio
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