Désir n’est plus intérimaire : au terme d’un scrutin exceptionnellement peu mobilisateur, l’actuel Premier secrétaire par intérim du Parti Socialiste est devenu Premier secrétaire tout court, bien trop court diront les méchants.
Après le vote, tout aussi squelettique, de jeudi dernier sur les motions en présence pour le congrès de Toulouse, ce dernier scrutin était de fait une simple formalité. Ce qui n’a pas empêché Emmanuel Maurel, candidat pour la forme de la gauche sociétaliste du PS à ce même fauteuil, de dénoncer les multiples irrégularités ayant entaché ces élections. Cela dit, tous les camps en présence s’accordent à penser que ces quelques bourrages d’urnes dans les sections ne relèvent que du folklore traditionnel socialiste et n’auraient pas changé le résultat final, contrairement à ce qui s’était passé il y a quatre ans à Reims.
On rappellera qu’en 2008, l’empoignade pour le poste de première secrétaire avait opposé mesdames Royal et Aubry. Martine avait finalement remporté l’élection avec 102 voix d’avance sur sa concurrente soit 50,04 % des suffrages exprimés. On rappellera aussi que la liste des fraudes électorales dressées par les deux camps était aussi longues qu’un discours de clôture de congrès, quoique plus rigolotes. Scandalisée par la partialité de l’arbitrage interne de la commission ad hoc du PS, Ségolène avait annoncé sa ferme intention de porter l’affaire devant les tribunaux de la République, ce que bien sûr, elle ne fit pas.
Mais rien de tel pour la cuvée 2012 : tant pis pour les mânes de Nougaro, Toulouse ne sera pas ville de castagne, la motion majoritaire ayant regroupé derrière elle la totalité des éléphants, des éléphantes et des éléphanteaux. Des postgauchistes aux néolibéraux, des européens béats aux patriotes ronchons, des décroissants aux nucléocrates, tout ce que le parti compte de poids lourds a tenu à afficher une splendide unité de façade derrière le new boss François Hollande et son working class Ayrault.
Exit la bagarre de chiffonniers, donc, mais, fort heureusement pour les persifleurs, cette unanimité qui va de Valls à Hamon en passant par Mosco et Montebourg n’est pas sans générer quelques situations poivrées, notamment dans les deux plus grosses fédés du parti, le Pas-de-Calais et les Bouches du Rhône.
Côté ch’ti, on ignore si Jean-Pierre Kucheida, patron de fait des socialistes du 62 depuis 30 ans, s’est déplacé pour soutenir Harlem Désir dans les urnes. Ce qu’on sait en revanche, c’est qu’il avait passé toute la journée de la veille en garde à vue, suite à sa mise en examen pour abus de biens sociaux. La justice lui reproche notamment d’avoir utilisé la carte bleue d’un organisme de logements sociaux du bassin minier qu’il présidait pour régler maintes factures somptuaires sans grand rapport avec le schmilblick. Nos confrères du Point ont par exemple évoqué une note de 1 624 euros au restaurant gastronomique de Marc Veyrat, près d’Annecy, où M. Kucheida possède une résidence secondaire.
En revanche, à l’autre bout du pays, Jean-Noël Guérini a tenu à signifier haut et fort son soutien total à la motion d’Harlem Désir. L’ancien patron de la fédération des Bouches-du-Rhône, qu’on croyait en congé du PS est apparemment à jour de cotisations, puisqu’il est allé voter comme un militant lambda.
Pourtant, un léger contentieux oppose le nouveau dirigeant national et l’ancien ténor marseillais du parti depuis la mise en examen de ce dernier en 2011. « Cette mise en examen doit marquer la fin du système Guérini », avait tonné Harlem à l’époque.
Après quoi Guérini s’était fait un plaisir de rappeler qu’Harlem Désir, lui aussi avait été mis en examen en 1998, mais, en plus avait été condamné par la justice pour emploi fictif : « S’il faut donner l’exemple, que le premier secrétaire du Parti socialiste par intérim soit le bon élève et commence par le faire. Il a été condamné ? Alors qu’il démissionne! »
Mais tout ça, c’est fini, aujourd’hui, c’est promis, c’est juré, le PS a reconstruit son unité et Guérini l’a prouvé en déclarant dans « Le Parisien » : « Je vote Harlem Désir. Harlem sera, j’en suis persuadé, un bon premier secrétaire. » Si Guérini le dit…
* image : Mathieu Delmestre/PS/Flickr
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