En Nouvelle-Zélande, un terroriste a massacré des musulmans simplement parce qu’ils étaient musulmans.
Le double attentat de Christchurch, qui a endeuillé ce matin la Nouvelle-Zélande, est une abomination. Un Australien de 28 ans, que ses écrits semblent rapprocher du suprématisme blanc, a ouvert le feu dans deux mosquées de la ville, tuant au moins 49 personnes, dont des enfants.
Mes lecteurs le savent, je condamne certains aspects de l’islam, et je condamne totalement l’islam politique et son cortège de tyrannies et d’horreurs. Mais je condamne tout autant cet acte atroce, cette brutalité aveugle, ce renoncement à toute exigence éthique au nom d’une cause.
Une infamie absolue
Qui peut savoir s’il n’y avait pas, parmi les morts, de ces réformateurs de l’islam, qui tentent d’utiliser son langage symbolique pour dire l’humanisme universel d’une manière compréhensible pour le monde musulman ? Qui peut penser qu’il n’y avait pas, parmi les morts, de braves gens totalement étrangers à la guerre que nous livre l’islam politique, et aspirant seulement à cheminer vers la transcendance selon les rites que leurs ancêtres leur ont enseigné, sans menacer la liberté de quiconque ?
Qui oserait prétendre que ces enfants, assassinés simplement parce que leurs parents les ont emmenés prier dans une mosquée, étaient en quoi que ce soit coupables des monstruosités commises ailleurs au nom de l’islam ?
Avoir versé le sang de ces enfants est un sacrifice à Moloch, une invocation au Mal, une infamie absolue. Le terroriste aurait-il attaqué des prédicateurs islamistes ou des djihadistes que son acte resterait évidemment illégal, stratégiquement maladroit et moralement discutable, mais ce serait tout autre chose. Ce qu’il a fait en revanche, rien ne saurait le justifier.
Nos semblables en humanité
Je ne dirai pourtant pas que ce crime doit nous conduire à vouloir la paix à tout prix, même si certains tenteront de nous le faire croire. L’islam politique est notre ennemi, il s’emploie à détruire tout ce qu’il peut y avoir de beau et de bon dans notre civilisation, comme dans toute civilisation, y compris les civilisations arabo-musulmanes. Complaisance ou lâcheté, il serait odieux de le laisser, ou de laisser ses complices et ses idiots utiles, prendre prétexte du drame de Christchurch pour nous désarmer face à ce qui est et demeure l’un des pires totalitarismes de l’histoire.
Parce que les morts de Christchurch sont nos semblables en humanité, parce que les islamistes menacent la liberté et la dignité de toute l’humanité, laisser quiconque instrumentaliser ce double attentat au bénéfice de l’islamisme serait trahir les morts, cracher dans leur sang et piétiner leurs corps.
Nous avons le devoir de faire ce qui est en notre pouvoir pour que plus jamais des innocents ne soient ainsi massacrés. Mais pleurer les enfants de Christchurch ne doit pas nous conduire à abandonner Nasrin Sotoudeh et Raif Badawi, ni à renier leur combat.
L’universalisme est la solution
Plus que jamais, c’est l’universalisme qui peut nous permettre de tenir bon face aux extrémismes comme face aux démissions relativistes. La fragmentation des sociétés en communautarismes rivaux, qu’ils soient basés sur l’origine ethnique, la religion, le sexe et/ou le genre, ne peut que conduire à la guerre des communautés les unes contre les autres, que cette guerre prenne la forme de la concurrence victimaire, des revendications juridiques incessantes ou de la violence criminelle.
« Tout comme toi, cet inconnu est fils de Zeus » me rappelle le chant ancien de l’aède. Cela l’oblige envers moi, cet inconnu, et cela m’oblige envers lui. C’est notre commune humanité qui me donne le droit d’interroger ses choix, d’exiger de lui qu’il les soumette à la critique éthique et rationnelle. Et c’est notre commune humanité qui me donne le devoir, même lorsque je dois l’affronter, y compris aux plans philosophique, politique, intellectuel, de le faire sans jamais oublier qu’il est mon adversaire ou même mon ennemi mais aussi mon semblable. Si l’Homme possède une dignité intrinsèque, nous la partageons.
Criminel, révoltant et absurde
La force et la détermination que nous devons mettre à combattre l’islam politique exigent de nous que nous refusions l’aveuglement facile d’une haine indistincte, pour choisir l’exigence d’un discernement de chaque instant.
Massacrer des musulmans simplement parce qu’ils sont musulmans, c’est leur ôter le devoir de s’arracher à la part d’ombre de leur religion en même temps qu’on leur en ôte le droit. C’est nier l’existence des musulmans humanistes et désavouer leur courage et leurs luttes. C’est accorder à ce qu’il y a de pire dans l’islam une puissance presque illimitée, qui suffirait à anéantir l’humanité de tout musulman, si ténu ou critique que soit son lien à sa religion. C’est criminel, révoltant et absurde.
S’il est des dieux réellement dignes de vénération, les enfants assassinés des deux mosquées de Christchurch sont maintenant avec les enfants assassinés de l’école Ozar Hatorah, à leurs côtés.
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