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L’extrême prudence de nos élites face à l’islamisme

«Attendons la fin de l’enquête» répètent-elles devant l'évidence d'attentats islamistes


L’extrême prudence de nos élites face à l’islamisme
Le jeudi 3 octobre, 4 personnes ont été tuées à l'arme blanche au sein de la Préfecture de police à Paris par Mickaël Harpon, converti à l'islam © Meryl Curtat/SIPA Numéro de reportage: 00926414_000006

 


En faisant la politique de l’autruche à la suite de chaque attentat islamiste, politiques et médias contribuent à amplifier la défiance des citoyens français à leur égard.



Suite à l’attentat de la Préfecture de police, nous avons une nouvelle fois droit aux habituels éléments de langage enjoignant chaque commentateur à de la prudence, et à attendre « la fin de l’enquête… »

C’est ce que l’on dit à chaque fois : laissons la police travailler et donner ses conclusions. Ne soyons pas trop hâtifs, soyons prudents, ce n’est peut-être pas ce que l’on croit.

Coups de folie, loups solitaires…

Alors je peux accepter d’attendre la fin de l’enquête, mais pour les autres attentats, la « fin de l’enquête » arrive la plupart du temps des mois plus tard avec un petit entrefilet qui ne dit rien. 

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Pour Mohamed Merah, qui se souvient de la fin de l’enquête ? Longtemps après sa mort, on parlait encore de loup solitaire, de coup de folie… Avant qu’un Gilles Kepel ne s’aperçoive qu’en fait il était parfaitement relié à un réseau terroriste. Sauf que lorsque Kepel a écrit là-dessus, qui l’a relayé ? Personne car le sujet était déjà daté.

Pour le récent attentat de Villeurbanne, on nous a aussi dit d’attendre les résultats de l’enquête, on nous a aussi parlé d’un déséquilibré.

Ces éléments de langage pour vous endormir

Pour l’attentat de Lyon, les mêmes éléments de langage ont été donnés, pour celui de la préfecture de police, c’est, sans surprise, le même réflexe : « surtout, n’en parlons pas ».

Beaucoup seraient d’accord pour attendre les résultats de l’enquête. Mais pour cela il faudrait accorder un minimum de confiance en la justice, en la hiérarchie policière et en la presse parisienne pour relayer et mettre en valeur les faits bruts et pas cette communication à base de « c’est un acte isolé », « ça n’a rien à voir », « c’est un coup de folie » … 

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Un « coup de folie » qui fait préparer une bombe artisanale et la déposer dans une poubelle devant une boulangerie avenue Victor Hugo à Lyon ?

Un « coup de folie » qui fait qu’un demandeur d’asile prend un couteau et un pic à viande, se rend à la station de métro Laurent Bonnevay à Villeurbanne et se met à frapper ceux qui « ne lisent pas le Coran ? »

Une France envahie par les déséquilibrés ?

Un « coup de folie » qui fait qu’un agent administratif fait rentrer un couteau un beau matin dans un des lieux les plus sécurisés de France et tue 4 personnes et en blesse grièvement une autre ? 

Bref, ce sont des « coups de folie » qui durent tout de même depuis pas mal de temps et qui font accomplir des actes sacrément réfléchis. 

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Ce genre de communication, qui est un automatisme aussi bien politique que médiatique a exactement l’effet inverse de celui qui est recherché : cela brise complètement la confiance entre les citoyens et ceux qui s’adressent à eux. Cela ne peut que faire naître du complotisme et il suffit de se rendre sur les réseaux sociaux pour comprendre le côté délétère de telles annonces.

Là où la pression médiatique pousse à minimiser, rechercher l’excuse psychiatrique quitte à paraître ridicule après coup, dans le seul but de ne pas effrayer l’auditeur, peut-être serait-il temps de se rendre compte que cette extrême prudence a exactement l’effet inverse et coupe les derniers liens de confiance qui existaient entre le peuple et les institutions chargées de sa sécurité et de son information.

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Arnaud Lacheret est docteur en science politique. Après une carrière dans plusieurs cabinets d’élus locaux et nationaux, il s’est reconverti dans l’enseignement supérieur et la recherche, et notamment le management public et l’analyse des politiques publiques. Il est depuis 3 ans en mission dans le Golfe arabo-persique au service du ministère des affaires étrangères où il dirige la French Arabian Business School en lien avec l’Essec, au sein de l’Arabian Gulf University à Bahreïn. Il est l’auteur de nombreux articles scientifiques et d’un ouvrage où il évoque le bricolage complexe et nécessaire que le Maire d’une banlieue sensible doit mettre en œuvre pour gérer efficacement le fait religieux et communautaire. « Les territoires gagnés de la République? » est édité par le bord de l’eau.

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