Une nouvelle fois, Emmanuel Macron s’est repenti au nom de la France. Cette culpabilisation de l’histoire nationale ne semble pas avoir de fin.
Avec ce président de la République, Dieu sait qu’on est invité à les revisiter, les pages sombres de notre Histoire ! Le 16 octobre, il a reconnu « les crimes du 17 octobre 1961 ». Il évoque « des responsabilités » lors des violences policières contre les manifestants algériens. Il faut créditer Emmanuel Macron d’une constance méritoire : plus le pouvoir algérien se plaint des contritions françaises, plus il en rajoute. Bientôt il ne saura plus où donner du regret ! On ne va tout de même pas aller jusqu’à inventer des horreurs imaginaires pour battre la coulpe française jusqu’à la lie !
La désolation nationale
Cette volonté présidentielle de cultiver un fort masochisme – les tragédies ont eu lieu mais en plus il faut les faire revivre en pleurant sur elles – n’est d’ailleurs pas perçue à sa déplorable valeur par ses opposants puisque, par exemple, Alexis Corbière en exige plus : il reconnaît les morts mais ne dit pas qui sont les tueurs ? Il n’a mis en cause que Maurice Papon ! Petit bras dans l’affliction, il aurait pu et dû faire mieux. Ou pire !
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Emmanuel Macron a beau faire des efforts pour montrer une image de notre pays en « mater dolorosa », cela ne suffit pas ! Je donne l’impression de badiner mais pourtant il n’y a pas de quoi rire. D’abord, par quels étranges détours ce président – certes intellectuel de gauche dans beaucoup de domaines encore, ceux qui relèvent notamment de notre Histoire, de notre protection et de l’évolution sociale – s’est-il fait une spécialité de cette volupté de la désolation nationale ? Certes celle-ci peut nourrir de beaux discours mais je ne crois pas que ce soit la raison essentielle. Il me semble que le président n’a au fond qu’un lien abstrait avec la France et les Français de sorte que s’exprimer au nom du pays en l’invitant à se fustiger ne le met pas en position d’appréhender les dégâts concrets, tangibles qu’il cause à notre mémoire nationale, à notre honneur collectif.
Ensuite, à la rigueur, on pourrait admettre de revisiter des pages sombres de notre Histoire si des pages splendides, épiques, glorieuses, ou tout simplement consubstantielles à la destinée de notre pays dans ses bons ou mauvais jours, faisaient l’objet de la même adulation pour le meilleur que celle prodiguée quasi-exclusivement pour le pire !
Caméléon
Comme à chaque fois qu’une date capitale et un hommage incontestable se présentent, on sent la gêne, le malaise, il ne faut pas en faire trop, on chipote, les lumières certes mais aussi les ombres ! Sous l’influence d’un clan d’historiens pour lequel la seule réalité française acceptable est une France couverte de cendres. Austerlitz, Napoléon : pourquoi célébrer avec fierté et munificence ce qui au fond devrait nous donner mauvaise conscience aujourd’hui : repentons-nous car il est arrivé à notre pays d’être grand !
Le paradoxe d’Emmanuel Macron, à bien lire l’ouvrage de Davet et Lhomme, notamment sur ses rapports avec Stéphane Bern et sa conception de l’Histoire, est qu’il semble au contraire friand de l’Histoire spectaculaire et royale, d’une chronologie illustre, de pompe et de gloire moquée par les historiens de gauche (ou progressistes : la même chose !). Ce qui pourrait signifier que le président de la République est un caméléon s’adaptant à chacun de ses interlocuteurs, ou que dans sa mission il est trop tenté de donner raison à ceux qui n’aiment la France qu’en état de contrition. Sûr ainsi de s’attirer l’approbation des intellectuels dits éclairés.
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Il faut du courage pour assumer l’Histoire de la France, dans ses péripéties admirables ou discutables, nationales ou coloniales. Il faut déjà accepter que tout n’a pas commencé en 1789 et que, dans la multitude des débats et controverses suscités par l’imprévisibilité et l’ambiguïté des réalités historiques, pour le moins il ne conviendrait pas de faire peser sur la France une présomption de culpabilité systématique.
Demain, aura-t-on encore le droit de se rassembler autour d’une personnalité, d’une victoire ou d’une fierté emblématiques de notre pays, ou serons-nous condamnés à continuer d’excuser la France ?