Paris a toujours connu plusieurs langues, différents argots selon les quartiers et selon les époques, de Villon à Céline en passant par Rictus et Fréhel. Aujourd’hui, le rap et son mixte de dialectes maghrébins colonisent le langage de la rue.
Jadis il advenait que l’on parlât titi. C’était le temps où la chanteuse Fréhel grasseyait son regret des « poulbots de la Butte ». Les « apaches » des Boulevards avaient leur idiome. Les « zoniers » des « fortifs » également (qui bivouaquaient sur les emprises de la fameuse enceinte de Thiers, là même où se coule le « périph »). Il y avait l’argot des forçats, mais aussi celui des bouchers, des marins, des lavandières, des croupiers, des chasseurs de restaurants, des mitrons, des vidangeurs, des ouvreuses, des lorettes : un argot des métiers. Puis un argot par quartier : Ménilmuche et Vaugirard, Belleville et La Chapelle – pas du pareil au même. Sans compter l’argot de la pègre.
Une langue vivace, composite, exubérante
De mémoire d’homme, l’argot a ses aèdes. Voyez Villon et ses Ballades, du milieu du xve siècle, et son jargon gay : « Gailleurs faiz en piperie / Pour ruer les ninars au loing : à l’assault tost sans süerie » ; traduction : « Homos trompeurs en fellations, pour pénétrer les dupes bien profond : à l’assaut sans éjaculer ». Jusqu’à Genêt, qui dédie les alexandrins de son Condamné à mort à l’assassin Maurice Pilorge : « […] Ces neiges sur mon page,
