« Récupération ! Récupération ! », crient les journalistes de France Inter, de France info, du Monde et de Libération, ainsi que les responsables de La France Insoumise, à propos des légitimes interrogations des députés et des chefs de mouvements politiques réclamant, suite au meurtre de Lola, des comptes aux représentants du gouvernement, lesquels se défaussent en maniant, à coups de « dignité » et de « respect », une langue mièvre et moralisatrice qui révèle au fond leur insincérité et leur incompétence.
Sur France Inter[1], Yaël Goosz s’est étranglé de rage en parlant d’Éric Zemmour puis a carrément suffoqué en évoquant Marion Maréchal et son soi-disant désir de « transformer des faits divers en guerre de civilisation ». Après une laborieuse digression par Bourdieu et son non moins laborieux essai Sur la télévision dans lequel le sociologue « disait, à propos des “faits divers”, qu’ils font diversion », le journaliste regrette vivement qu’Olivier Véran ait concédé que le « gouvernement pouvait faire mieux en matière d’expulsions ». Surtout que nos compatriotes courent de moins en moins de danger : en trente ans, a précisé le réconfortant Yaël Goosz, le nombre d’homicides a été divisé « au moins par 2 ». Voilà les Français complètement rassurés.
Sur le plateau de BFMTV, face à Marion Maréchal, Alain Duhamel a répété à l’envi que le temps n’était pas venu de débattre, qu’il fallait respecter un délai, ne surtout pas réagir à chaud, sur le coup d’une émotion légitime mais mauvaise conseillère. Lorsque les médias et certains responsables politiques ont étalé à la une de leurs journaux et sur les plateaux de télévision la photo du petit cadavre d’Aylan afin de stigmatiser des Européens trop frileux devant l’afflux migratoire, personne n’a parlé de « récupération » sordide ou d’un délai à respecter, a opportunément rétorqué Marion Maréchal. Après avoir évoqué le quart de la moitié du dixième des exactions criminelles commises en France par des immigrés en situation irrégulière, elle a demandé : « À partir de combien de litres de sang a-t-on le droit de parler, de s’indigner, et de demander des réponses aux responsables ? » Alain Duhamel a dit être choqué par « l’image des litres de sang » qui est « une façon un peu inhumaine (sic) de poser la question ». Ne voulant rien savoir du nombre effarant et en constante progression d’actes de violence perpétrés quotidiennement en France, en particulier par des individus en situation irrégulière et souvent « connus des services de police », Alain Duhamel trouve qu’il est un peu « inhumain » d’en parler – comme ses confrères, il parlera bientôt d’autre chose ; les sujets qui éloignent de la dure réalité ne manquent pas.
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De son côté, Yann Barthès, le journaliste inculte de l’émission Quotidien, a voulu faire coup double : en même temps qu’il bêle avec ses confrères sur le thème de la « récupération », il demande à ce que soit renvoyé chez lui « l’immigré québécois de CNews », Mathieu Bock-Côté. Yann Barthès a à nouveau fait montre de sa bêtise et de son absolue impossibilité à comprendre une phrase composée de plus de trois ou quatre mots : voulant moquer le sociologue québécois « tordu », il fait visionner une séquence dans laquelle ce dernier livre une longue et perspicace réflexion sur les deux « catégories de victimes » – le petit Aylan, Georges Floyd ou Adama Traoré d’un côté, et Lola de l’autre – et la manière dont la presse et certains partis politiques ont instrumentalisé la première et s’apprête à faire le silence sur la seconde. Si Yann Barthès parvient à imiter l’accent québécois de Mathieu Bock-Côté, il peine en revanche à atteindre le cent millionième de l’intelligence du brillantissime chroniqueur de CNews – afin de ne pas être taxé de « validisme » par les associations défendant les « personnes en situation de handicap », nous éviterons d’évoquer un possible retard mental, résultat d’une carrière abrutissante. C’est pourtant pas l’envie qui manque.
Beaucoup de personnes se font les porte-voix de la famille de Lola qui désirerait que ne soit pas « récupérée politiquement » la mort de leur enfant. En réalité, il est à craindre que tout ce petit monde – ministres de l’Intérieur et de la Justice, journalistes de gauche et représentants politiques d’extrême-gauche – espère seulement que le temps fera glisser doucement mais sûrement cette ultime tragédie dans les oubliettes de la mémoire. Un exemple parmi cent justifie cette crainte : qui se souvient (ou même a seulement entendu parler) des trois jeunes gens (16, 18 et 20 ans) tués à Angers à coups de couteau par un Soudanais de 32 ans en situation irrégulière, alors qu’ils cherchaient à protéger deux jeunes filles péniblement importunées par ce dernier ? Pourtant… ce drame s’est déroulé il y a à peine plus de trois mois, le 16 juillet précisément. Le silence des médias dits de référence ou de gauche a triomphé : la mort de ces jeunes hommes qui ont ravivé, comme l’avait fait avant eux le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, un sentiment chevaleresque bien français – la défense du plus faible au risque de perdre la vie – n’a été « récupérée » par personne.
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L’omerta règne. Libération, Le Monde, L’Obs, la télévision et la radio publiques sont aux abonnés absents ou murmurent de très courtes et très éphémères informations dès qu’il s’agit de parler des meurtres mettant en cause des immigrés en situation irrégulière ou non. Les exemples ne manquent malheureusement pas. Entre autres, la mort d’Alban Gervaise, ce médecin militaire égorgé « au nom d’Allah » par Mohamed L. devant l’école catholique où il venait récupérer ses enfants, est passée presque totalement inaperçue. Les médias de gauche, secondés par le cabinet du Chef d’État-Major des Armées et le service communication du Gouvernement militaire de Marseille déclarant que la famille refusait toute médiatisation, sont restés étrangement discrets. Christelle Gervaise, l’épouse d’Alban Gervaise, a formellement démenti le 5 septembre dernier, sur son compte Facebook, avoir refusé la médiatisation de l’affaire et a précisé que son message rectificatif pouvait être partagé. À ma connaissance, aucun média mainstream n’a repris cette information – ce qui nous renseigne une fois de plus sur certaines pratiques d’occultation de la vérité.
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Comme Céline Pina, je ne crois pas que la mort de Lola amènera à une prise de conscience. D’abord, parce que le plan d’occultation de la vérité qui a si bien marché pour les crimes évoqués plus haut est déjà en marche pour la malheureuse Lola[2] et aboutira, d’une manière ou d’une autre, au même résultat. Ensuite, parce qu’une grande partie des « élites » universitaires, intellectuelles, médiatiques et politiques ne semble nullement s’inquiéter des bouleversements civilisationnels provoqués par la multiethnicisation et la tribalisation de la société française. Plus inquiétant encore, majoritairement, les plus jeunes générations issues des classes moyennes et poursuivant des études universitaires ne savent presque rien de ce qui se trame réellement en France. Les médias qu’elles consultent n’abordent les sujets qui fâchent qu’avec la plus grande parcimonie, trop occupés qu’ils sont à promouvoir « l’ouverture à l’autre » et à dénoncer la « fachosphère ». De plus, l’idéologie écologiste inculquée à l’école et dans les médias a totalement anesthésié ces jeunes gens qui surveillent la consommation d’eau et d’électricité de leurs compatriotes, amis ou parents, calculent leurs bilans carbone et ne jurent que par les éoliennes, le végétarisme et la décroissance, mais ignorent tout des problèmes auxquels la France et l’Europe sont d’ores et déjà confrontés en termes d’immigration. Dressés depuis leur plus jeune âge au binarisme conflictuel, sectaire et imbécile (dominants/dominés, Blancs/“racisés”, hommes/femmes, hétéros/LGBT, beaufs/écolos), à l’acceptation du contrôle social auquel ils participent en tant qu’agents d’application des idéologies les plus mortifères (celles sur le genre ou le climat, entre autres), au refus de préserver tout ce qui a fait la beauté et la grandeur de leur pays, ces jeunes gens, à l’instar des étudiants de Sciences Po, ont voté majoritairement Mélenchon lors de la dernière élection présidentielle. Militants, ils sont aujourd’hui les propagandistes de l’idéologie gauchiste, écologiste, wokiste et immigrationniste. Ils seront bientôt les professeurs, journalistes, universitaires et responsables politiques qui donneront le la en matière d’éducation de la population. Ils seront demain les nouvelles « autorités d’occultation », pour dire comme Gilles-William Goldnadel. Car rien ne devra entraver un multiculturalisme qu’ils considèrent comme un bienfait ; aucune ville mise à sac ne pourra les empêcher de promouvoir un « vivre ensemble » qu’ils exporteront jusque dans les coins les plus reculés de l’hexagone ; aucune Lola ne les détournera des discours lénifiants sur l’immigration qui est « une chance pour la France ». Entre deux lâchetés (ou « accommodements raisonnables ») face à l’islam prosélyte, l’élite wokiste, européiste et immigrationniste réclamera de nouvelles lois « progressistes », intersectionnellement diversitaires, pro-genres et écologistes. Parallèlement à ce basculement civilisationnel, la barbarie tribale continuera de gagner du terrain. Je ne vois rien, pour le moment, qui puisse contredire cette vision funeste. Le pire est donc encore à venir.
[1] France Inter, édito politique de la Matinale du 20 octobre 2022.
[2] Pour s’en convaincre, il suffit de lire, par exemple, l’éditorial du Monde du 25 octobre intitulé « Obsèques de Lola : la mort d’une enfant, de l’émotion à l’exploitation ». « Indigne », « cynique », « discours sécuritaires », « articles haineux », « scandaleux », autant de syntagmes qui ponctuent l’article d’un journal qui n’a sans doute pas apprécié de devoir écrire sur un « fait divers » auquel il destinait vraisemblablement le même traitement discret, pour ne pas dire furtif, que celui qu’il a appliqué à tous les « faits divers » évoqués ci-dessus.