Paul Sugy publie L’Extinction de l’homme, le projet fou des antispécistes chez Tallandier. Journaliste au Figaro, il a découvert l’influence des idées antispécistes alors qu’il étudiait à l’École normale supérieure. Au début, il ne les a pas prises au sérieux, mais s’est ensuite rendu compte de la portée et des risques de cette idéologie.
Dans son essai, Paul Sugy explique les origines des idées antispécistes. Ce projet est, selon lui, une vraie révolution intellectuelle. Ce n’est pas seulement le bien-être animal qui est en jeu. La question est de savoir s’il y a une différence de degré ou de nature entre l’homme et l’animal. Pour les militants antispécistes, bien sûr, cette différence est… inconvenante !
Le spécisme (c’est-à-dire la différence entre les espèces) serait selon eux une discrimination. Ils veulent abolir la différence entre les « animaux humains » et les « animaux non humains ». La distinction philosophique bien connue entre nature et culture serait obsolète.
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L’auteur rappelle que si tous les antispécistes sont végans, tous les végans ne sont pas antispécistes. Le véganisme est un mode de vie, l’antispécisme une idéologie.
On n’arrête pas le progrès (du mouvement antispéciste)
Paul Sugy décrit dans son ouvrage les différentes étapes qui ont mené à ces revendications actuelles baroques. Dans La Libération animale, paru en 1975, Peter Singer avait une réflexion morale. Il a fondé une hiérarchie du vivant basée sur le degré de conscience de chaque animal. La pensée de ce précurseur est une référence pour les mouvements qui défendent les droits des animaux.
Cela a débouché sur une réflexion philosophique sur l’essence de l’animal, avec le courant de la déconstruction. Paul Sugy explique que l’antispécisme se confond et prolonge la pensée queer : après l’indistinction des sexes, on arrive à l’indistinction des espèces. Donna Haraway, féminisme queer, va même jusqu’à parler de zoophilie avec son chien. « Melle Cayenne Pepper [il s’agit d’une chienne] n’en finit pas de coloniser toutes mes cellules. […] Comment aurais-je pu résister à ses baisers mouillés ? […] Nous avons tenu des conversations illicites ; nous avons entretenu des rapports oraux… » écrit-elle dans son Manifeste des espèces compagnes.
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En France, Aymeric Caron et Hugo Clément font quant à eux des opérations de vulgarisation auprès du grand public. Cela aboutit à un véritable phénomène de société, tout le monde se sent concerné par la cause animale.
Avec des associations telles L214, la cause antispéciste a ensuite atteint le stade politique. En 2015 en France, les revendications des antispécistes ont abouti au stade parlementaire et législatif avec l’amendement Glavany : « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité », peut-on désormais lire à l’article 515-14 du Code civil. En Argentine, certains animaux sont déjà des sujets de droit non humains. « Élever l’animal au rang de personne reviendrait à lui reconnaître une personnalité, c’est-à-dire une vie psychique et une conscience de lui-même » dit Paul Sugy.
Un matérialisme poussé à l’extrême
« La protection animale est le marxisme du XXIè siècle » avance Aymeric Caron (!) L’antispécisme est un matérialisme absolu qui réduit la dignité de la vie à sa dimension biologique. Les antispécistes oublient le propre de l’homme (la vie intellectuelle, la raison, le langage…), c’est une grave dérive intellectuelle, très subversive. « Réduit à sa dimension biologique, il ne reste plus rien d’humain dans l’homme. C’est le grand danger de l’antispécisme : nous faire oublier qui nous sommes » avait prévenu Sugy dès l’introduction. Faudra-t-il demain scolariser les animaux ? Et ensuite, peut-être leur donner le droit de vote ?
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Pour défendre leurs thèses, les antispécistes mettent en avant la notion de sentience. La sentience désigne la capacité des êtres à ressentir des affects, de la souffrance et des émotions. Selon eux, cela fonde la frontière morale dans nos rapports avec le monde animal. Cependant, les pistes neurologiques et comportementales permettant d’énoncer si tels ou tels animaaux sont sentients sont tout à fait discutables scientifiquement. Les antispécistes instrumentalisent la connaissance du vivant et prêtent des émotions aux animaux. Dans le cas d’un chien, on sait qu’il a mal et qu’il en est conscient si on le frappe, mais aucun scientifique ne peut prouver que le moustique éprouve de la douleur quand on l’écrase avec une tapette à mouche.
Animaliser l’homme
Là où l’écologie propose une préservation raisonnée des espèces, l’antispécisme est problématique car il ne s’intéresse qu’aux « individus ». Certains antispécistes, comme le mouvement RWAS[1], sont prêts à accepter la disparition de certaines espèces d’animaux sauvages si elles sont incapables de vivre en paix. On marche sur la tête ! D’autres, comme l’activiste Solveig Halloin, instrumentalisent carrément la Shoah et estiment que les camps de concentration se perpétuent à travers les abattoirs…
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« Dès lors que l’on accepte de renoncer à la prééminence des intérêts humains sur ceux des autres animaux, on ne peut rester antispéciste à moitié : cet engagement ne tolère pas la demi-mesure […] L’antispécisme, tout à son ambition de libérer les animaux, ne prône rien moins qu’un nouvel asservissement. Celui des hommes » écrit Paul Sugy.
Paul Sugy le démontre brillamment en 170 pages : élever les animaux au rang des hommes revient surtout à animaliser l’homme.
[1] RWAS : reducing wild animal suffering ou réduction de la souffrance des animaux sauvages
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