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Mon DVD chez les nudistes


Mon DVD chez les nudistes

nanni moretti girardot

Trop chaud pour travailler, compte à zéro, pas le courage de se baigner, trop de risques à bronzer !  Voici une sélection de cinq films en DVD pour vous sauver de la noyade. Avec eux, ni risque d’insolation, ni promiscuité sur la plage, ni même de maladies vénériennes, mais 100 % d’émotion, en canapé, à la flemmarde, tout en sirotant une anisette. Du ciné à la maison pour un été plein d’évasion.
Voyage à deux (1967)
Stanley Donen a redonné à l’automobile, son pouvoir éminemment érotique de faire et défaire les couples. Voyage à deux réunit Audrey Hepburn et Albert Finney, à plusieurs moments de leur vie, en cabriolet MG ou en Mercedes Pagode, notamment sur les routes de France. Dans cet univers clos qu’est la voiture, un homme et une femme se rencontrent, s’aiment puis se déchirent. Déjà à la fin des années 60, la « bagnole » commençait à être accusée de tous les maux de la Terre, c’était sans compter la caméra de Donen, intrusive et toujours aussi sensible. Les réalisateurs américains qui aiment la France sont nos meilleurs ambassadeurs. Donen, virtuose de la comédie musicale, adore nos chemins de campagne, il fait danser nos paysages, chanter notre désinvolture légendaire. Que nous étions attractifs en 1967 pour le reste du monde ! Et puis comment ne pas tomber sous le charme de ce couple-là ? Ils sont beaux, racés et fragiles. Finney attaque Hepburn par un  indiscret « Are you virgin ? » à l’arrière d’un camion. Sur une musique d’Henry Mancini, Audrey, cheveux courts, lunettes sixties démesurément grandes, maillot de bain rayé est, sans conteste, le rêve estival de tous les français.
DVD Voyage à deux de Stanley Donen – Studio : Carlotta films

La vieille fille (1972)
Qu’est-ce qui arrive à un type qui tombe en panne en Cadillac dans le Sud de la France et qui se dirigeait vers l’Espagne ? Il rencontre une vieille fille dans un hôtel de Cassis. Jean-Pierre Blanc a formé le couple Philippe Noiret/Annie Girardot et réuni près de 1,8 million de spectateurs en 1972 dans cette récréation balnéaire douce-amère. La même année, Edouard Molinaro faisait également des deux acteurs son couple fétiche de « La Mandarine » d’après le roman de Christine de Rivoyre. Personne ne s’attendait à un tel succès. Pas une once d’action, des scènes de bronzette, de déshabillages très prudes, une salle de restaurant bondée, des vacanciers à bout de souffle mais un charme poisseux, délicieux témoignage de la France du début des années 70. Jean-Pierre Blanc travaillait dans l’organdi, Girardot irrésistible d’émotion contenue, Noiret à l’hésitation conquérante, une Marthe Keller qui n’a jamais été aussi belle et désirable et puis, un désopilant couple de mystiques déjantés (Edith Scob et Michael Lonsdale). A la fin de la décennie 70, Philippe de Broca capitalisera sur le tandem Noiret/Girardot dans un registre plus léger. La rencontre entre un commissaire de police et un professeur de grec dans « Tendre Poulet » suivi par « On a volé la cuisse de Jupiter », une autre comédie estivale de quoi (re)découvrir la Grèce autrement que par le prisme de la Troïka et se rincer l’œil en revoyant Catherine Alric vêtue d’un slip de bain blanc. Tout simplement blanc.
DVD La vieille fille de Jean-Pierre Blanc – Studio Canal

L’hôtel de la plage (1978)
« Qui n’a pas été dans un hôtel face à la mer ? Je ne voulais pas la Côte d’Azur, ce n’est pas la même atmosphère ». Michel Lang justifiait ainsi son choix de la Bretagne et de cette pension de famille où petits et grands se retrouvent chaque été. Après le succès en 1976 d’« A nous les petites anglaises » sans stars à l’affiche, le réalisateur récidive avec au programme : air iodée, bande de jeunes et amourettes de vacances. Il pose sa caméra à Locquirec, invite quelques seconds rôles flamboyants du cinéma français Daniel Ceccaldi et Guy Marchand, de jeunes actrices talentueuses Sophie Barjac et Anne Parillaud, remplit son parking de GS et R20 et pour assurer l’ambiance, fait appel à Mort Shuman, mélodiste imparable. Si vous ajoutez à ce tableau marin, un belge infidèle, des balades en solex, un gamin qui pleure sans arrêt, un mari jaloux, un prof de gym trop entreprenant, des plateaux d’huîtres, vous aurez l’image assez fidèle des classes moyennes, un été, à la fin des années 70. Dernier slow, dernier espoir, dernier baiser volé, avant la France « modernisée » de la décennie suivante.
DVD L’hôtel de la plage de Michel Lang – Studio Gaumont

Les sous-doués en vacances (1982)
Ils ont eu le bac. Tant pis pour nous. Claude Zidi n’abandonne pas une équipe qui gagne. Daniel Auteuil, alias Bebel (ça commence fort) et sa bande de bras cassés partent ensemble en vacances. L’été, on n’a pas toujours envie de voir un chef d’œuvre du septième art. Un bon nanar avec blagues teutonnes et p’tites pépées en bikini à l’affiche, ça rassure le vacancier las d’une époque qui intellectualise le moindre navet. On y retrouve même des douceurs d’enfance, le goût écœurant des chichis et le côté bien gras de l’huile solaire. Gare à l’indigestion tout de même. La recette de cette grosse tarte tropézienne est improbable. Ça dépasse l’entendement. Ces sous-doués accumulent les incohérences, les absurdités, on flirte avec les inepties de l’art contemporain. Je passe sur les potacheries, Hubert Deschamps chirurgien en proie à des problèmes de longueurs de jambes, des sosies de BB, une cantatrice, des sœurs jumelles incarnées par Grâce de Capitani sans oublier la présence à l’écran de Gérard Lenorman. Et en apothéose, bouquet final, Guy Marchand qui interprète Destinée. Du lourd , très lourd !
DVD Les sous-doués en vacances de Claude Zidi – Studio : Opening

Journal intime (1994)
Casque blanc, tee-shirt noir, lunettes Persol, Nanni Moretti sillonne une Rome déserte au guidon de sa Vespa. C’est drôle, nostalgique, émouvant, politique, méditerranéen au plus profond de son âme. Si vous ne connaissez rien de l’Italie, Journal intime en est l’expression la plus fantasmagorique. Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 1994, ce film est si personnel qu’il en devient universel. Découpé en trois chapitres (« Sur ma Vespa », « Les îles », « Les médecins »), on dirait un roman de Robbe-Grillet avec de la chair et du sens,  Journal intime illustre merveilleusement cette pensée de Cioran : « La mélancolie rachète cet univers, et cependant c’est elle qui nous en sépare ». Ayez toujours ce DVD à portée de la main ! Au moindre coup de mou, revoir Moretti, au cœur de l’été, zigzaguant au son de « I’m your man » de Léonard Cohen et « Didi » de Khaled, c’est tellement jouissif. Indispensable pour oublier tous ces affreux qui nous entourent. Tous ces malfaisants. Et puis, la scène où Moretti apostrophe l’actrice Jennifer Beals, si, si, celle de Flashdance, est mémorable.
DVD Journal intime de Nanni Moretti – Studio Canal



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Journaliste et écrivain. À paraître : "Tendre est la province", Éditions Equateurs, 2024

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