Pas une semaine ne passe sans qu’un nouveau délire de la culture « woke » ou de la « cancel culture », deux concepts importés pour notre plus grand malheur des États-Unis, ne nous fasse tomber de l’armoire!
Le dernier en date ne nous arrive pas des États-Unis mais de Belgique. La Belgique, pays on ne peut plus proche de la France puisque limitrophe, francophone et dont celui qui a été élu plus grand Belge de tous les temps, Jacques Brel, a commencé à connaître le succès à Paris et non à Bruxelles.
Chaud cacao, une chanson accusée de cumuler les stéréotypes sur l’Afrique
« C’était au temps où Bruxelles rêvait, c’était au temps du cinéma muet » chantait le Grand Jacques il y a 60 ans. Et 60 ans après on pourrait réécrire les paroles en chantant « c’était au temps où Bruxelles déconnait, c’était au temps où la woke sévissait », puisque c’est désormais une icône belge aujourd’hui disparue, Annie Cordy, qui est accusée d’avoir interprété une chanson raciste: « Chaud cacao ». Cette chanson est accusée de « cumuler les stéréotypes sur l’Afrique » et « l’esprit de la chanson pose problème ». Pourtant en relisant les paroles, on parle de bambous (rares en Afrique), de caïmans (les crocodiles vivent uniquement en Amérique centrale et du Sud), de pingouins (relativement rares en Afrique) ou encore de pandas (vivant exclusivement en Asie). On parle bien dans le refrain de noix de coco et d’ananas, mais aucun pays africain ne se trouve parmi les dix premiers producteurs mondiaux de noix de coco, et le Nigéria est le seul pays africain parmi les principaux producteurs d’ananas (à la 8e place). Alors si les paroles « posent problème », on se demande bien pourquoi.
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Maintenant, regardons d’autres chansons francophones qui peuvent aussi poser problème. Annie Cordy, encore elle, a chanté une chanson ouvertement germanophobe avec « Frida oum papa ». Carlos, Pierre Perret et Francky Vincent ont vanté le patriarcat avec « Papayou », « le zizi » et « tu veux mon zizi ? », chansons valorisant l’organe du viol. La culture du viol est d’ailleurs omniprésente dans la chanson « Big bisou » de Carlos (un récidiviste, comme Annie Cordy) où on s’embrasse sans demander un consentement éclairé à l’embrassé.e (il faut bien l’écrire en écriture inclusive). Pire, des chansons peuvent cumuler racisme et femme objet comme Julien Clerc lorsqu’il chante « Melissa métisse d’Ibiza est toujours dévêtue »…
Évidemment, Gainsbourg, avec « Love on the beat » (où on entend sa compagne Bambou crier lors de leurs ébats) et « Lemon incest » chanté avec sa fille Charlotte, doivent aussi être mis au pilori, chose d’ailleurs envisagée lors des trente ans de sa disparition il y a quelques jours.
Chantal Goya antispéciste
Certains mériteraient pourtant des éloges pour avoir écrit des chansons contre les dominants de la société.
On remerciera Chantal Goya d’avoir chanté les louanges d’un lapin qui a tué un chasseur et Annie Cordy bénéficiera de circonstances atténuantes pour avoir chanté « la bonne du curé » contre les cathos! Pour « noir c’est noir » de Johnny, une commission d’enquête sera instaurée à court terme pour savoir si cette chanson doit ou non être bannie des ondes. On remerciera aussi le rappeur Nick Conrad pour « Pendez les blancs », qui est une chanson en pointe de l’antiracisme.
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« C’était au temps où Bruxelles rêvait » est une chanson qui faisait partie de l’album « les Bourgeois ». Les bourgeois, comme ceux qui défendent la cancel culture ou défilent aux César, sont comme les cochons : « Plus ça devient vieux plus ça devient bête, plus ça devient vieux plus ça devient con ». Six mois après sa mort, Annie Cordy va-t-elle rejoindre le triptyque de l’infamie belge avec Léon Degrelle et Marc Dutroux ? De là-haut, elle doit nous dire: « Adieu les cons ! »
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