Montrer les “entrailles” de la Vieille Dame à toutes et tous semble indispensable aux “progressistes” de l’Hôtel de Ville. Logique en ces temps de transparence généralisée. Un étrange projet.
C’est une information qui serait passée inaperçue en ces temps de grosses chaleurs et de départs en vacances, sans la vigilance des équipes de Causeur qui ne connaissent pas la trêve estivale!
Dans une récente tribune publiée dans le Monde, Christophe Girard, inventif adjoint à la Culture d’Anne Hidalgo, a esquissé les mystérieux desseins de la Mairie quant au devenir de la cathédrale de Notre-Dame… Découvrons ce vaste et noir projet dans les cartons de cet “État dans l’État”.
On se la joue d’abord conservateur…
Comme la cathédrale est un assez vieux machin (neuf siècles au compteur), “le moindre des devoirs” est d’assurer “à l’édifice la plus grande longévité que nous sommes capables de lui donner” commence prudemment la tribune. Un départ encourageant (voire banal) pour notre Chargé de Culture. Non, la Mairie n’entend pas raser l’édifice pour étendre “Paris Plages” ni faire un vaste appel à projet alternatif via budget participatif. Quid alors des projets de reconstruction avant gardistes (certains diraient grotesques, et d’autres, blasphématoires !) proposés « dès le lendemain de la catastrophe » par une kyrielle d’architectes plus ou moins connus ?
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Girard rejette leurs initiatives visant à “recourir à des techniques d’avant-garde” pour reconstruire la “forêt” (la charpente NDLR). Car la Mairie, sans doute consciente des réticences probables d’une population encore sous le choc, écarte prudemment ces hypothèses : voilà qui tranche avec le principe de modernité comme unique cahier des charges de tout projet culturel, se dit-on avec soulagement.
Pas question de reconstruire Notre-Dame en titane comme un vulgaire Parlement de Bretagne, ou en ciment comme la cathédrale de Reims. Reconstruisons la « forêt » à l’identique, nom de Zeus ! Procéder autrement serait un « crime contre l’esprit », selon le Chargé de Culture. Si ce “conservatisme” est de bon aloi, attendons quand même la suite. L’avis des Catholiques, lui, n’est pas évoqué.
… pour mieux dénaturer l’esprit des lieux ensuite
Comme on pouvait le prévoir, cela se gâte rapidement ! Pour justifier le caractère conservateur de la reconstruction en bois de la charpente, la tribune s’empresse d’abord d’ancrer cette réalisation du Moyen-Âge dans notre présent. “Sans le savoir, la complexité de cet enchevêtrement faisait déjà référence à notre monde connecté (sic!) et à ses liaisons sans fin” nous apprend-on. Et Anne Hidalgo, c’est Esmeralda ? L’enchevêtrement de bois, destiné à soutenir les cloches ou les mouvements de gymnastique de Quasimodo, c’est la même chose que la fibre ou le réseau des Vélib’… apparemment.
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Ravi (de la crèche?), notre tribun entend passer commande immédiatement de la nouvelle “ forêt” aux Compagnons du Devoir, dans un rare et hâtif élan de générosité de commande publique. Tout reconstruire à l’identique dans un plaisant esprit de respect du sacré ? Réparer l’outrage des flammes ? Permettre à la cathédrale de retrouver quelque quiétude ? Oui, mais pas seulement ! Et voici le deuxième volet du projet …
Une réplique façon Lascaux
“Ne serait-il pas temps aujourd’hui d’offrir à notre contemplation les entrailles de Notre-Dame?” s’interroge le responsable de la Mairie.
Exposer l’ouvrage commandé aux artisans à des millions de visiteurs qui se pressent du monde entier en charters et vols low cost sur le site, voilà qui est urgent ! Girard envisage de montrer aux touristes – reconstruit par nos artisans – ce qui a été brûlé. Une réplique, façon Lascaux. “L’emprise au sol de cette forêt – 100 mètres de long, 13 de large – n’est pas telle que nous ne puissions pas lui trouver un emplacement” précise-t-il. La vue de la “forêt” était jusqu’alors réservée à “quelques initiés”. Une sorte de scandale démocratique, tout à fait anachronique à l’ère d’Homo Festivus.
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Et même s’il n’est pas certain que cela soit absolument clair dans la tête d’Anne Hidalgo et ses hommes de main, signalons cette hypothèse cocasse : se retrouver peut-être bientôt avec… deux charpentes ! “Si, d’aventure, sous la pression d’architectes intransigeants, il était décidé malgré tout de reconstruire Notre-Dame [aussi] avec sa charpente en bois, la cathédrale aurait la sienne et les Parisiens la leur” annonce Girard, fanfaron.
Finalement, grâce à la Mairie de Paris, cet incendie dramatique se transformerait presque en bonne nouvelle.
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