Le roman d’Annabelle Mouloudji raconte les passions désespérées et lumineuses d’une mère de famille en rupture de ban
La passion amoureuse, c’est la grande affaire de Duras. Quand l’un de ses romans est lu par Fanny Ardant, tout devient une évidence, et l’on serait prêt à reprendre le sentier herbeux de cette passion dévastatrice qui ressemble à la lumière d’août. L’époque est au rétrécissement des amours. La gratuité, celle de l’enfance, encore épargnée par les irradiations de la société, ne peut plus jouer sa partition, ou alors dans des cas très particuliers.
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La narratrice de L’Amoureuse, roman sensuel d’Annabelle Mouloudji, fille de l’inoubliable interprète d’Un jour tu verras, n’échappe pas au piège de la passion amoureuse. L’ennui du quotidien la pousse à tomber dans les bras d’un certain Marc, stéréotype du mâle dominant, un peu pervers narcissique sur les bords. Elle finit par quitter son mari, David, dont elle a deux garçons. La mère de famille de quarante ans a besoin d’une nouvelle respiration. La reproduction de l’espèce étant accomplie, le corps réclame son dû, celui du plaisir. Les scènes, très érotiques, décrites par la narratrice, le prouvent. Mais il est difficile de tourner la page avec David, d’autant plus que Marc la déçoit, pire l’inquiète. Il n’a pas rompu totalement avec son ex-femme, ses fils sont insupportables, et, cerise sur le gâteau, il semble infidèle. Marc offre à la narratrice l’affiche du film Et Dieu créa la femme, de Roger Vadim, avec la mythique Bardot. La jeune actrice, inimitable, joue le rôle de Juliette, une orpheline, qui revendique haut et fort le droit à la liberté absolue. La narratrice devrait suivre son exemple. Elle finit par rompre avec Marc, mais son absence la plonge dans une durable dépression. Le temps passe, assassin, et elle devient la femme qui « ne saigne plus ». Surgit alors Pierre. Sera-t-il enfin le bon ? La fin du roman a quelque chose de surprenant. Elle laisse penser qu’il n’y a jamais de fin entre deux êtres qui se sont, certes mal aimés, mais sincèrement aimés. Quant au chagrin, il n’est pas certain, comme l’affirme Gigi, la voyante, qu’il finisse par passer. Pour paraphraser Van Gogh, le chagrin durera toujours.
Annabelle Mouloudji, L’Amoureuse, Éditions Léo Scheer. En librairie le 7 juin.
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