En Haute-Marne, des toiles datant du XIXe siècle ont été récemment restaurées. Que penser du résultat ?
Scandale culturel à Chatonrupt-Sommermont. Après la découverte l’été dernier, dans le grenier de l’église du village de Haute-Marne, de tableaux représentant les stations du chemin de croix, la municipalité sans moyens ne savait que faire de ces toiles abîmées. Un peintre amateur de la commune s’est alors proposé pour les restaurer bénévolement.
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Armé de peinture et de pinceaux achetés 40 euros dans un magasin de bricolage, l’esthète retraité a nettoyé la couche de fiente de pigeon, comblé les trous et donné des couleurs vives aux tableaux, pour le plus grand bonheur des fidèles qui espéraient les voir embellir la petite église rurale. Problème : malgré une médiatisation de la restauration dans la presse locale, tout cela s’est fait sans l’aval de la DRAC du Grand Est qui s’est réveillée en mars, posant la question de la valeur patrimoniale des œuvres datant du milieu du XIXe siècle. Trop tard : 12 des 14 toiles avaient déjà été « relookées », ruinant tout espoir d’une restauration professionnelle.
Un trésor de plus de perdu à cause de la négligence de l’État vis-à-vis de son patrimoine ? Peut-être pas. Quand on regarde les photos de l’« avant/après », on est peu convaincu de l’intérêt artistique des toiles en version originale : des compositions néoclassiques banales à moitié déchirées, non signées, certainement issues d’une production de masse. Bref, des croûtes. Pas étonnant que la mairie, qui croyait d’abord avoir trouvé un « tas de bois pourri », ait envisagé de « jeter le tout à la poubelle ».
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Certes, la restauration assez naïve pourrait certainement être d’un goût plus exquis. Mais au moins, tout en faisant le bonheur des locaux, les tableaux pourront retourner à leur première fonction : décorer l’église et servir au culte, plutôt que d’attendre dans un cagibi muséal une illusoire restauration professionnelle (les restaurateurs ayant bien mieux à faire). Des croûtes sympathiques et colorées remplaçant des croûtes tombant en morceaux : le patrimoine français n’a pas grand-chose à y perdre.