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Berlin poignarde la défense européenne

La dissuasion est mauvaise si elle est française


Berlin poignarde la défense européenne
Un Tornado de l'Armée de l'air allemande, photographié en 2015 © Carsten Rehder/AP/SIPA Numéro de reportage: AP21829205_000001

Une tribune de Jérôme Rivière, député européen (Identité et démocratie), membre de la commission Affaires étrangères, Sécurité Défense, et de Louis Aliot, député (RN) des Pyrénées orientales et membre de la commission de la Défense de l’Assemblée nationale


Un grand quotidien allemand a révélé jeudi 16 avril que l’Allemagne allait commander 45 avions de combat aux États-Unis.

Cette décision de remplacer les anciens Tornado de la Luftwaffe (un avion de combat développé par l’Italie, le Royaume-Uni et l’Allemagne et mis en service dans les années 1980, capable de porter des munitions nucléaires air-sol de fabrication américaine) par une flotte mixte américano-européenne est très révélatrice des profondes et réelles tendances de l’État allemand. Elle constitue une rupture, l’avion européen Tornado étant remplacé par un avion américain.

Berlin est anti-nucléaire avec Paris et pro-nucléaire avec Washington

Elle met en évidence le choix de l’Allemagne d’être le premier serviteur zélé de l’OTAN.

La décision – empressée – d’acheter à Boeing 45 F-18 (30 Super Hornet Block III et 15 Growler), via le système FMS (Foreign Military Sales), un contrat d’État à État, témoigne de la volonté de Berlin de demeurer fidèle envers et contre tout, même au détriment des accords de coalition CDU/SPD, à une mission stratégique de l’Alliance.

La solution américaine est lourde sur les plans financier, diplomatique, industriel, et de ce fait, pèse beaucoup plus lourd que la décision d’acheter l’Eurofighter européen, chargé seulement de missions de surveillance, et donc incapable de porter des munitions nucléaires.

En une phrase: pour Berlin, l’OTAN pèse plus que l’Europe de la défense.

Ce n’est pas une surprise, mais une confirmation que le dialogue franco-allemand sera toujours subordonné au lien transatlantique. Paris doit donc, plus que jamais maintenir son indépendance militaire pour avoir les mains libres. 

L’obsession de Berlin de continuer à remplir cette mission nucléaire, en dit aussi long sur le double langage allemand dans le domaine de la dissuasion… L’Allemagne est méprisante vis-à-vis de la force de frappe française qu’elle considère comme un hochet de prestige de puissance dépassée mais… devient intéressée quand il s’agit d’en être un acteur (même sous tutelle complète américaine). Berlin est anti-nucléaire avec Paris et pro-nucléaire avec Washington. Là aussi, ce n’est pas une surprise mais une confirmation. Et une bonne raison supplémentaire pour Paris de cesser tout dialogue européen sur cette extravagante et impossible mutualisation de sa force de frappe, pour se concentrer sur le renouvellement de sa dissuasion à son seul profit !

Enfin, notons que l’Allemagne commande quatre types d’appareils (Super Hornet, Growler, EF-2000 Tranche 3 et 4, voire cinq) pour une mission nucléaire non permanente (déployée au cas où les États-Unis le décident), là où la France n’a besoin d’aligner qu’un seul modèle pour garantir en toutes circonstances la pérennité d’une dissuasion intégralement nationale  : le Rafale polyvalent des FAS et de la FANU. C’est l’illustration du bien-fondé de notre choix du Rafale dont la polyvalence permet des économies et dont l’évolution par standards successifs, en garantit l’évolution jusqu’en 2050. C’est enfin la confirmation du mauvais choix qu’a représenté l’EF-2000 pour les armées de l’air clientes, obligées de compléter leur flotte avec des avions américains, scellant ainsi leur totale dépendance diplomatique, industrielle et technologique envers les États-Unis, via l’OTAN. 

Cette décision allemande prouve une fois de plus que l’Europe de la Défense est une chimère. Les Nations doivent à tout prix conserver leurs pouvoirs régaliens. La grave crise sanitaire que nous vivons a fini de le prouver.



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