Plus d’un an après que le chancelier allemand, Olaf Scholz, a annoncé un grand «changement d’époque», suite à l’invasion russe de l’Ukraine, peut-on affirmer que l’Allemagne a vraiment changé de cap? Depuis 1945, l’histoire du pays suggère une réalité plus complexe et plus contradictoire que son gouvernement ne veut bien admettre.
Quelques jours seulement après l’invasion de l’Ukraine du 24 février 2022, le Chancelier de la République fédérale annonce devant le Bundestag un « changement d’époque » («Zeitenwende»). Il s’agit d’augmenter les dépenses militaires et revoir la politique allemande de défense et de sécurité afin de faire du pays une puissance militaire forte, capable de prendre le leadership en Europe.
Cette rupture n’est pas passée inaperçue. Les États-Unis, ayant cajolé l’Allemagne depuis longtemps avec le qualificatif de «partner in leadership», ont exprimé leur satisfaction. Le Royaume Uni, un peu agacé, a formulé une approbation de principe, tout en émettant quelques doutes sur la bonne exécution. Quelle a été la réaction de la France ? Jusque-là, elle s’accommodait assez bien d’une division du travail dans laquelle les Allemands excellaient sur le front économique (et finançaient généreusement l’Europe en conséquence), tandis qu’elle assumait le premier rôle dans la défense militaire de l’UE (disposant d’armes nucléaires, de forces combattantes aguerries, d’excellents services diplomatiques et de renseignement, et de territoires outre-mer offrant des avantages stratégiques). A l’annonce de la Zeitenwende, elle a frémi.
L’Ouest ou l’Est ? Un dilemme historique pour les Allemands
Dans la vie politique intérieure, le discours de la Zeitenwende a agi comme un détonateur, déclenchant de multiples débats et prises de position.
L’Union chrétien-démocrate (la CDU et la CSU – sœur bavaroise de la première) a vu dans la tournure que
