En Allemagne, l’ « Alliance Sahra Wagenknecht, Pour la raison et la justice » (BSW) réalise un score tout à fait honorable aux dernières élections. Face aux succès de l’AfD (droite dure), l’égérie pète-sec de la gauche « réac », ex-Die Linke, devient une faiseuse de rois.
Il n’y a pas qu’en France où le paysage politique connait des mutations étonnantes. Aux récentes élections régionales en Saxe et en Thuringe (ex-Allemagne de l’Est), le parti d’extrême droite AfD a affiché un succès spectaculaire avec respectivement 30,6% et 32,8% des voix le 1er septembre, soit une confortable avance sur toutes les autres formations (à l’exception des conservateurs qui les devancent d’une courte tête en Saxe).
Mais si l’on y regarde de plus près, un autre fait attire l’attention : le parti BSW, inconnu au bataillon jusqu’à l’année dernière, réussit l’exploit de se hisser à la troisième place avec 11,8% et 15,8% des voix. Son leader n’est autre que Sahra Wagenknecht, égérie de l’extrême gauche et ancienne cadre du parti Die Linke (équivalent allemand de LFI). Or, Wagenknecht détonne dans le paysage actuel de la gauche européenne : originaire de RDA, cette native de Iéna n’hésite pas à défendre une ligne marxiste « vieille école », pro-russe et anti-migrants – elle a ainsi publiquement annoncé vouloir revenir à une politique d’immigration beaucoup plus ferme.
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Une concurrence pour le moins inattendue pour l’AfD, qui ne pensait pas devoir jouer des coudes avec l’extrême gauche sur ce sujet. Et ce n’est pas tout : Wagenknecht pourfend même l’idéologie sacro-sainte du wokisme qu’elle ne considère « pas de gauche », créant un malaise dans les sphères socialistes d’outre-Rhin. Son pari est incontestablement gagnant : elle se permet même de ridiculiser ses anciens amis de Die Linke en les devançant assez nettement, emmenant avec elle des foules de nostalgiques de la RDA et des communistes réactionnaires. Derrière les beaux tailleurs et le chignon impeccable se cache donc une cacique de la gauche dure, qui n’a visiblement pas l’intention d’en rester là.
Ironie du sort, les conservateurs de la CDU se voient donc obligés de négocier avec elle une coalition afin d’éviter des gouvernements locaux dirigés par l’AfD. Certaines couleuvres doivent être difficiles à avaler. Dimanche 22 septembre, lors des élections régionales, le BSW confirme sa percée en réussissant à obtenir 13,5% des voix dans le Brandebourg (soit la 3eme position). De quoi nourrir une guerre des gauches à la Mélenchon-Ruffin, version germanique ?
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