Les journalistes au chevet de Juppé


Les journalistes au chevet de Juppé

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Les smartphones vibrent à tout rompre ce matin. Annonces fracassantes de Manuel Valls ? Appel à la démission formulé par Jean-François Copé ? Nouvelle illustration de la décadence morale entraînée par les pro-gender ? Que nenni. Alain Jupppé est allé « passer des examens » à l’hôpital du Val-de-Grâce. Les esprits taquins y verront des examens pour le moins approfondis puisque l’ex premier ministre en a pris pour deux jours.

Avant de connaître la cause de son hospitalisation, la santé de Juppé a donc passionné les médias, probablement bien plus que le petit peuple dont nous sommes. La fascination de ceux-ci pour la santé (ou plutôt la mauvaise santé) de leurs gouvernants interpelle dans un pays où les hommes politiques affichent une moyenne d’âge canonique. Une constatation validée par le sociologue Louis Chauvel, auteur de plusieurs travaux sur le vieillissement des représentants politiques ou syndicaux, en hausse constante,en moyenne de 1,5 an par an depuis le début des années 80.

Si la sagesse est synonyme d’expérience, gageons que les parlementaires français ne doivent pas manquer de modération, et il n’y a probablement que les mauvaises langues dont nous sommes pour relever dans leurs comportements des accès de puérilité dignes du théâtre de boulevard.

Forts de leur grande sagesse, nos hommes politiques y laissent, et c’est le revers de la médaille, un tribut inévitable. Certes choyés et disposant de dispositifs médicaux réduisant fortement le vecteur du hasard, ces gouvernants vieillissants ne subissent pas moins la même dure réalité que tout-un-chacun : l’espérance de vie dite « en bonne santé » augmente moins rapidement que l’espérance de vie tout court.

Le ramdam que fait la presse autour de la santé de Juppé nous renvoie aux précédents Chirac et Mitterrand. Si les bulletins de santé de Juppé sont scrutés par la presse, c’est probablement parce que celui-ci est aux yeux de l’opinion, un « présidentiable » à l’aune des élections de 2017. Pour avoir un président qui fasse sien la maxime selon laquelle un esprit sain ne puisse s’exprimer que dans un corps sain, il faut s’interroger sur l’âge du maire de Bordeaux. Or c’est passé 70 ans que l’état de santé des deux ex-présidents de la République sus-mentionnés s’était fortement dégradé, au point de perturber sérieusement leur exercice du pouvoir.

Dans une période politique où les dérives du culte de l’image contraignent les candidats à la présidentielle à s’astreindre à des régimes ou à suer en jogging, l’idée d’un futur président qui n’aurait pas moins de 72 ans au moment de son élection après le marathon que représente une campagne présidentielle inquiète forcément. Une situation assez paradoxale qui voudrait que nos hommes politiques cumulent les qualités d’expérience et de santé physique irréprochable.

L’énergie que certains déploient pour masquer le moindre signe d’une santé vacillante est désormais vaine. Si les présidents Pompidou et Mitterrand parvenaient à tenir secrets leur bulletins de santé, l’ère de la politique-spectacle et des dictaphones sous le bureau contraint à une plus grande transparence, dont Juppé fait les frais.

De manière générale, il s’agirait de savoir s’il est raisonnable que les postes à très hautes responsabilités de l’Etat soient convoités par des hommes qui ont dépassé l’âge légal de la retraite depuis une bonne dizaine d’années.

*Photo :  POUZET/SIPA .00669071_000012.



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