Fallait-il pour les uns quitter la séance, faut-il pour les autres présenter des excuses ? Le mieux est de vous faire une opinion par vous-même, grâce aux vaillants sténographes de l’Assemblée Nationale, qui nous ont restitué l’intégralité de la question orale du député apparenté PS de Martinique à Claude Guéant :
« Nous savions que pour M. Guéant la distance entre immigration et invasion est totalement inexistante et qu’il peut savamment entretenir la confusion entre civilisation et régime politique. Ca n’est pas un dérapage, c’est une constante parfaitement volontaire. En clair, c’est un état d’esprit et c’est presque une croisade. M. Guéant vous déclarez du fond de votre abîme, sans remord ni regret, que toutes les civilisations ne se valent pas. Que certaines seraient plus avancées voire supérieures. »
« Non M. Guéant, ce n’est pas « du bon sens », c’est simplement une injure qui est faite à l’Homme. C’est une négation de la richesse des aventures humaines. C’est un attentat contre le concert des peuples, des cultures et des civilisations. Aucune civilisation ne détient l’apanage des ténèbres ou de l’auguste éclat. Aucun peuple n’a le monopole de la beauté, de la science du progrès ou de l’intelligence. Montaigne disait « chaque homme porte la forme entière d’une humaine condition ». J’y souscris. Mais vous, monsieur Guéant, vous privilégiez l’ombre. »
« Vous nous ramenez, jour après jour, à des idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration au bout du long chapelet esclavagiste et colonial. Le régime nazi, si soucieux de purification, était-ce une civilisation ? La barbarie de l’esclavage et de la colonisation, était-ce une mission civilisatrice ? »
« Il existe, M. le premier ministre, une France obscure qui cultive la nostalgie de cette époque, que vous tentez de récupérer sur les terres du FN [À ce moment-là, François Fillon se lève et part, suivi du gouvernement]. C’est un jeu dangereux et démagogique qui est inacceptable. Il existe une autre France, celle de Montaigne, de Condorcet, de Voltaire, de Césaire ou d’autres encore. Une France qui nous invite à la reconnaissance, que chaque homme… »[M. Letchimy est alors coupé par le président de l’Assemblée, Bernard Accoyer].
Voilà, c’est dit. Qu’ajouter ? Et bien deux petites choses
Primo, il ne suffit pas de succéder à Aimé Césaire à la mairie de Fort-de-France pour hériter de son talent.
Secundo, les ministres et députés UMP exagèrent d’avoir quitté si vite la séance : à cause de leur empressement à fustiger Letchimy, on ne saura jamais quelle était sa question…
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