Le non-lieu récent, prononcé par la justice française dans une affaire qui l’opposait à une ex-compagne, sonne comme un cruel désaveu pour le tribunal médiatique et les juges autoproclamés. L’humoriste pourra-t-il poursuivre sa carrière d’artiste comme si de rien n’était ? Notre contributeur est allé voir.
Ary Abittan a donc bénéficié d’un non-lieu mardi. Un cruel désaveu pour le tribunal médiatique. C’est même un cinglant camouflet ! Qui nous rappelle que la présomption d’innocence doit rester sacrée et que seule la justice est souveraine.
De retour en tournée
Le 4 avril, Braine-le-Comte, petite ville qui assume sa langueur entre Mons et Bruxelles, a ouvert ses portes et ses bras au comédien. Avant Mâcon, Aix-en-Provence Marseille, Blois, Tours, mais aussi Londres et Tel-Aviv… Il y a deux jours, le couperet est tombé. Et on a remballé la guillotine médiatique empressée. Un non-lieu vient d’être ordonné par la justice[1] dans l’affaire qui lui avait valu une mise en examen pour le viol supposé de sa compagne, en 2021. En juillet dernier, l’accusation s’était déjà affaissée, en le rétrogradant comme simple « témoin assisté ».
Le comédien entre en scène. Les cinq cents spectateurs présents lui font un triomphe. La présomption d’innocence, allègrement piétinée dans cette affaire, prend une revanche tardive. Mais derrière le rire toujours aussi communicatif, les entrechats virevoltants, les mimiques expressives qui n’appartiennent qu’à lui, la blessure est là. Encore saignante ? Cruellement ouverte, sous le pansement de la vie qui reprend ? Il faudra du temps pour qu’elle se cautérise…
« Je suis le dernier à être déconfiné » assure-t-il d’emblée, goguenard, dès ses premiers pas sur la scène. Délaissé, abandonné, vilipendé, on lui avait ainsi assuré une cruelle réclusion forcée, avant que les juges ne finissent par statuer en sa faveur… Ce qui équivalait à une mise à mort sans bruit pour ce comédien vibrionnant, qui ne vit que par et pour son public. Un séisme dans la vie de l’acteur – qui voyait l’échelle de Richter manquer d’échelons pour traduire sa détresse : un téléphone qui se mure dans un silence impitoyable, des « amis » abonnés à sa table et parfois bien placés qui se détournent…
Pas d’esprit de revanche
Pourtant l’artiste jovial, le comédien décalé n’entachera pas son show de quelques mots assassins et surtout revanchards. Non ! il est au-dessus de cela. Juste quelques formules lapidaires, toujours à la sauce comique, seront lancées à la cantonade pour ironiser sur sa garde à vue et son périple en « Justicie », en même temps que pour jauger l’adhésion et la compréhension de son auditoire. Mais rien de bien méchant. En réponse au scandale, l’humour même pas cinglant.
A lire aussi : La légende des cycles
C’est peu de dire que dans cette affaire, le tribunal médiatique, les jurés des réseaux sociaux, les magistrats du zinc et les féministes autoproclamées ont bassement foulé aux pieds l’un des fondements de la justice dans nos démocraties inquiètes : la présomption d’innocence. D’autres personnalités, d’autres artistes, d’autres inconnus sirotent encore et toujours ce même fielleux cocktail qui les voit condamnés avant tout hypothétique procès. Il n’est ici pas question de mettre en doute les dires des victimes mais de leur rétorquer un définitif : la Justice, toute la Justice, mais rien que la Justice. Sur scène, hier soir, Abittan reprenait du service sans commenter davantage les calomnies.
[1] La plaignante, qui l’accuse de lui avoir imposé un rapport sexuel en octobre 2021, a fait appel mercredi.