On peut être conservateur et innovant : des militants anti-IVG polonais font un malheur avec leur application « Adopte une vie ». Le principe est d’une simplicité biblique : une fois votre smartphone à jour, vous vous engagez solennellement à « prendre spirituellement en charge » le développement d’un enfant virtuel pendant les neuf mois de « grossesse », c’est-à-dire à l’accompagner avec vos chapelets et vos bonnes actions. En retour, l’adopté vous enverra chaque jour un SMS pour vous rappeler de prier pour lui et vous donnera régulièrement des nouvelles de sa trépidante vie utérine.
Ainsi le troisième jour après la « conception », c’est-à-dire le téléchargement, l’enfant vous sermonnera en vous priant de ne pas l’appeler « embryon » et vous demandera si vous croyez sincèrement qu’il a une âme. Dès la troisième semaine, les choses s’accélèrent, car vous pourrez désormais entendre les battements de son cœur. Un mois plus tard, vous aurez le bonheur d’accéder à ses échographies (offertes gracieusement par des mères polonaises). Ensuite, il vous invitera à parler de lui dans votre entourage ou vous demandera d’entonner une berceuse.
« Je recommande aux non-croyants »
Si les 100 000 utilisateurs sont globalement satisfaits de l’application, la majorité d’entre eux regrette, sur le forum réservé aux abonnés, de ne pas avoir la possibilité de donner un prénom à leur « bébé », ce qui les empêche parfois de nouer un lien plus fort avec lui. Sur le même forum, Anna raconte sa panique quand elle a été obligée de changer de téléphone alors qu’elle n’en était qu’au cinquième mois. Zygmunt s’est fait voler le sien, ce qui l’a profondément bouleversé. Edward, quant à lui, s’est demandé plus pragmatiquement : comment savoir avec certitude si l’enfant est blanc, noir ou asiatique ?
Mais le pire bad buzz est venu de la part de Beata, 14 ans, qui a envoyé ce message après qu’on l’a félicitée d’être parvenue au terme des neuf mois d’adoption : « C’est du bidon. Je n’ai jamais prié pour lui et il est né malgré tout. Je recommande aux non-croyants. » Beata n’a pas précisé explicitement si elle se moquait là de ceux qui croient en Dieu ou bien en la toute-puissance du net. Mais dans les deux cas, c’est un sacré blasphème !