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Aboubakar Cissé ne priera plus

Meurtre à la mosquée, le regard libre d'Elisabeth Lévy


Aboubakar Cissé ne priera plus

Le suspect du meurtre survenu vendredi dans une mosquée à Grande-Combe (30) s’est rendu à la police en Italie. À l’extrême gauche, on instrumentalise le drame pour accabler le ministre de l’Intérieur, et tenter de réhabiliter le terme polémique d’ « islamophobie » – un terme piégé, rappelle Elisabeth Lévy.


Le meurtre d’Aboubacar Cissé, 20 ans, dans une mosquée proche d’Alès est une dramatique première en France – un musulman tué dans une mosquée alors qu’il priait. Cela provoque chez tous une immense tristesse, et de l’effroi devant la sauvagerie – on parle de 50 coups de couteaux. On pense à ses proches, aux Grand-Combiens qui semblaient avoir adopté ce jeune Malien, à nos compatriotes musulmans et à tous les croyants qui ont peur maintenant quand ils vont prier.

Malgré la légitime prudence du procureur, il est difficile de ne pas voir dans un tel crime se produisant dans une mosquée une dimension raciste ou anti-musulmane.

Une dimension anti-musulmane qui semble évidente

La condamnation est unanime, du président de la République, du Premier ministre et de la classe politique. Cela n’empêche pas Dominique Sopo de SOS Racisme de dénoncer un soi-disant silence assourdissant.

À gauche, on déroule le narratif habituel. Ceux qui hurlent d’ordinaire à la récupération et à l’instrumentalisation quand on s’interroge sur le terreau d’une agression islamiste, antisémite ou antiblanche se jettent sur l’événement avec ce que les Allemands appellent la « Schadenfreude » – cette joie mauvaise. On vous l’avait dit, l’islamophobie tue.

En quelques heures, nous avons assisté à une déferlante de communiqués des élus insoumis. Jean-Luc Mélenchon, qui qualifiait les assassinats de Merah d’incidents: « Le meurtre d’un musulman en prière est le résultat des incessantes incitations à l’islamophobie ». C’est la faute à Retailleau, à CNews et à Le Pen. Surtout Retailleau, d’ailleurs. Le ministre de l’Intérieur avait piscine, persifle Sopo. Non : il est ministre des cultes et avait enterrement du Pape.

Il est vrai que l’ « islamophobie » se répand en France, me dit-on…

Comme Manuel Valls, je récuse ce terme, inventé par les Mollahs pour discréditer et criminaliser toute critique de l’islam. Pour le recteur de la mosquée de Bordeaux, ce sont les discours politiques sur l’islam et l’immigration qui nourrissent la haine. Non : ce qui nourrit la haine, c’est le déni.

On a le droit de détester l’islam, le marxisme, le judaïsme voire la théorie de la relativité. Ce qui est criminel et attentatoire à la République c’est d’agresser des musulmans, des juifs ou des disciples d’Einstein.

De plus, convenons qu’en matière de critique, l’islam ne montre pas toujours son meilleur visage. En France, ce n’est pas l’islamophobie qui tue le plus souvent des journalistes, des professeurs, des juifs ou des chrétiens – mais l’islamisme. L’emprise croissante des Frères musulmans est une autre réalité. Selon un sondage paru hier, 88 % des Français (et 75% des sympathisants LFI !) sont favorables à l’interdiction des Frères musulmans. Tous des fachos ?

Pour Mélenchon, l’islamophobie est un étendard politique – on le sait. C’est plus fâcheux chez François Bayrou (« ignominie islamophobe »), carrément surprenant chez Laurent Wauquiez. Derrière ce terme de faussaire, il y a le récit fallacieux d’une France gangrenée par le racisme antimusulman. En réalité, des tas de Français musulmans sont ultrapopulaires. Les Français sont très accueillants et tolérants. Mais, ils ne veulent pas changer leur façon de vivre. Puisque l’on considère nos concitoyens musulmans comme des concitoyens à part entière, ils doivent accepter comme les autres la critique.

A Grand-Combe, le racisme anti-musulman a fait son premier mort. C’est évidemment un de trop. Nous voulons tous que ce soit le dernier. Sauf ceux qui pensent que quelques martyrs serviraient leur cause et leur pouvoir. Suivez mon regard.


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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