Il y a un demi-siècle, le 6 avril 1974, le groupe pop suédois gagnait le concours de l’Eurovision avec son titre « Waterloo ». Sa chanson rythmée, son style et son look vestimentaire détonnaient alors. Le prochain concours, qui sera organisé le 11 mai à Malmö en Suède‚ devrait en toute logique lui accorder une petite place…
Bien sûr, il y a l’éternel débat, jamais tranché, afin de déterminer qui, des Beatles ou des Rolling Stones, est le plus grand groupe de tous les temps. Evidemment, il y a eu Queen, sa rhapsodie bohémienneet le destin tragique de Freddie Mercury. Mais aussi Nirvana, dont le chanteur s’est éteint il y a juste trente ans, The Who, AC/DC, Pink Floyd… Et puis ABBA, qui remporta l’Eurovision avec son titre Waterloo, le 6 avril 1974, à Brighton, dans le sud du Royaume-Uni. Il y a cinquante ans. Un demi-siècle, une éternité.
La naissance du concours de l’Eurovision tel qu’on le connait à présent
Les pays représentés lors de la grand-messe annuelle de la chanson figeaient alors les cartes mentales de l’Europe. La Yougoslavie était encore unie et toujours sous la férule de Tito, Israël et Monaco étaient conviés au concours. L’Union soviétique n’avait pas encore été démantelée. Les votes, déjà égrenés au compte-gouttes, étaient, moins qu’aujourd’hui, dictés par des raisons géopolitiques, de minorités établies dans les pays voisins ou d’excentricités à la mode.
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Année après année, des bluettes avaient permis à leurs auteurs de remporter le concours ; André Claveau, Jacqueline Boyer et Isabelle Aubret avaient inscrit le nom de la France au palmarès ; France Gall celui du… Luxembourg, et Séverine de Monaco. Quand Agnetha et Frida rejoignirent Benny et Björn sur scène, ce jour de printemps 74, l’histoire du concours et de la musique s’en trouva à jamais transformé. Avec eux, un style « Eurovision » était né.
Le groupe, quant à lui, n’allait plus jamais quitter le devant de la scène, avec une musique tantôt kitsch, tantôt joyeuse, éveillant la mélancolie à chacun des disques et des tubes qui s’enchaînèrent : Dancing Queen, The winner takes it all, Mamma Mia… Le quatuor se sépara, les couples formés en son sein divorcèrent, puis la magie opéra à nouveau en 2021, le temps d’un dernier album et d’une déclaration de foi unissant à jamais les quatre Suédois : I still have faith in you. Un condensé de la vie et de sa musicalité en somme.
Nostalgie des jours heureux
En 1974, le monde était déjà entré dans une nouvelle phase de difficultés suite au premier choc pétrolier, mais il flottait encore dans les airs un parfum d’insouciance et de légèreté qu’incarnaient ABBA et ses membres, leurs chansons au rythme enjoué et leurs costumes excentriques – utilisés, nous apprennent Eric Anceau et Jean-Luc Bordron dans Histoire mondiale des impôts, afin d’éluder les taxes.
Cinquante ans plus tard, le monde est à la croisée des chemins, entre guerres larvées et réelles, tensions sur fond de multiculturalisme et autres dérèglements climatiques. Il demeure une nostalgie des jours heureux. Il n’est donc pas étonnant que, pour le meilleur et souvent le pire, tout le monde s’arrache désormais ABBA afin d’en faire des films et des comédies musicales. Gageons que l’on pourra ainsi déjouer les paroles de la chanson Waterloo : « And now it seems my only chance is giving up the fight ».
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