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À Londres, le 6 mai: une foule plus royaliste que le roi

Reportage, parmi les Britanniques, lors du couronnement du 62e roi d’Angleterre


À Londres, le 6 mai: une foule plus royaliste que le roi
Malgré la pluie, cette famille est venue voir le roi, Londres, 6 mai 2023 © Photos: Maximilien Nagy.

Notre correspondant londonien a assisté aux célébrations populaires qui ont marqué le jour du couronnement du roi Charles, le samedi 6 mai. Au parc de Saint James, situé pile-poil entre le palais de Buckingham et l’abbaye de Westminster, où la cérémonie solennelle a eu lieu, des dizaines de milliers de Britanniques et de citoyens des 14 autres Royaumes du Commonwealth, du Canada à la Nouvelle Zélande, sont venus fêter le sacre de Charles III et de sa reine consort, Camilla. Reportage au cœur de l’évènement.


Dès six heures du matin, au parc de Saint James qui longe le Mall, cette avenue triomphale qui conduit au palais de Buckingham, des dizaines de milliers de personnes de tous les âges se réunissent pour entre-apercevoir le monarque passer dans son carrosse et fêter le premier couronnement outre-Manche depuis 70 ans. 

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Nombreux sont ceux qui sont arrivés la veille, voire plusieurs jours en avance, pour être sûrs d’assister au passage du roi. « C’est un évènement que je ne vivrai qu’une fois dans ma vie », témoigne Beth, une jeune retraitée de 70 ans, venue de Manchester par le train de minuit. À l’instar d’un grand nombre de ses concitoyens, elle attend cet évènement avec impatience depuis septembre dernier. « Il fallait que je vienne pour lui rendre hommage. Je ne pouvais pas rester simplement chez moi devant une télévision », poursuit-elle. Pour l’occasion, toutes les extravagances vestimentaires sont permises : couronnes en carton, costumes et robes aux couleurs de la Grande Bretagne, kilts…  Quand j’interroge les Britanniques autour de moi pour savoir ce qu’ils pensent de la monarchie, la réponse est unanime et ne se fait pas attendre : « May the King reign for ever ! » Que le roi règne pour toujours ! Lorsque l’air de l’hymne national retentit pendant la procession entre le palais de Buckingham et l’Abbaye de Westminster, des dizaines de milliers de voix dans la foule entonnent en cœur les paroles, en demandant à Dieu de garder le roi : « God save the King ! ».

Le temps de la maturation

Charles III a connu des moments difficiles dans les années 1980 et 1990 du fait de ses relations turbulentes et finalement tragiques avec la princesse Diana. Mais cette époque semble si loin. Pour la foule, c’est de l’histoire ancienne. Aujourd’hui, sa popularité est incontestable. Sue, une retraitée australienne, venue à Londres spécialement pour le couronnement, ne cache pas son affection pour son roi : « Nous l’aimons beaucoup et nous le connaissons bien parce qu’il a passé tant de temps dans le rôle du prince de Galles. Charles III est tout à fait digne de régner et nous sommes fiers de lui. Notre bon king Charles a su dépasser les difficultés de sa jeunesse et il a un grand mérite pour cela ». Si Charles a désormais une place dans le cœur des Britanniques, ce n’est pas seulement chez les vieux. John, âgé de 26 ans, déjà entré dans la vie professionnelle, à l’allure et à l’expression bien aristocratiques, est venu fêter le couronnement avec deux de ses amis et apporte son plus fervent soutien au roi : « Le couronnement de Charles III et Camilla marque la continuité quasi ininterrompue de notre monarchie à travers les siècles. C’est un grand privilège pour nous de vivre ce moment exceptionnel et de rendre hommage à notre souverain. Aucune autre monarchie n’attire les yeux du monde entier. God Save the King ! » clame-t-il fièrement avec ses deux compères, une coupe de champagne à la main. 

Trois jeunes très « comme il faut » dans le parc de Saint James

Au moment de son accession au trône, en septembre 2022, « Sa Majesté » a su s’attirer l’affection de ses sujets en montrant son côté chaleureux et émotif. Aujourd’hui, sa manière très personnelle, à la fois réformatrice et conservatrice, d’assumer le rôle de monarque, visible dans la façon dont il a simplifié le cérémonial du sacre tout en gardant les aspects les plus anciens, semble susciter admiration et respect.

Orgueil et préjugés

On peut toujours compter sur les Britanniques pour exhiber au grand jour et sans aucun complexe leur fierté d’être un peuple à part, ayant ses propres traditions et coutumes qui semblent d’une autre époque. La foule qui se rassemble à Londres est consciente de sa longue histoire et de son héritage, dont un nouvel épisode s’ouvre ce samedi 6 mai avec l’onction et le couronnement par l’archevêque de Cantorbéry de Charles III, le 62ème roi d’Angleterre et le 13ème roi du Royaume Uni. Loin d’être « vieillottes », la parade militaire et la cérémonie du sacre, dans l’ancestrale Abbaye de Westminster, conservent toute leur actualité pour ces gens qui non seulement acceptent que le gouvernement défraie les coûts de la cérémonie, mais ne se laissent aucunement découragés par le temps typiquement maussade du joli mois de mai outre-Manche… 

La pluie – la météo nationale – ne décourage pas les Britanniques, puisque la pluie elle-même est typiquement britannique

Au début du sacre, Charles a déclaré : « Je viens pour servir, non pour être servi ». Au parc de Saint James, des groupes de jeunes suivent son exemple, en s’y rendant pour participer à l’organisation de l’événement, comme Euan, 20 ans, étudiant en ingénierie à l’université de Cumbria tout au nord de l’Angleterre. Il me confie son enthousiasme pour la monarchie : « Le couronnement de Charles III perpétue une tradition plus que millénaire dans mon pays. De plus, cette tradition sait évoluer avec le temps et s’adapter aux changements de la société. En tant que scout, j’ai fait la promesse de servir le roi et je suis fier de pouvoir participer à cet évènement historique avec des milliers d’autres jeunes de ma génération. » Pour les gens que je côtoie ici, la monarchie et la famille royale constituent des facteurs d’unité, des marqueurs de leur propre identité collective. Toujours selon Euan : « Notre monarchie a un pouvoir unificateur et pour notre pays et pour le Commonwealth. C’est un prestige unique que nous devons préserver ! » Non seulement l’ambiance générale est bon enfant, mais la foule semble inspirée par cette « décence ordinaire » dont George Orwell a si bien parlé. 

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Le lundi 8 mai, à Paris, un autre chef d’État, Emmanuel Macron, a commémoré la fin de la guerre en Europe en 1945 et, à Lyon, a rendu hommage à Jean Moulin. Il a soigneusement évité un bain de foule que la population n’aurait sans doute pas voulu lui offrir. Son seul contact avec la foule a probablement été l’écho lointain de quelques casseroles. Quel contraste avec les scènes de liesse outre-Manche ! Nous autres Français, devons-nous censurer cet orgueil national des Britanniques, le jalouser ou, d’une manière ou d’une autre, trouver le moyen de l’imiter ?  Photo (« Notre correspondant »). Notre correspondant (le 2e à partir de la gauche) est accueillie par des sujets de sa gracieuse Majesté à une fête de rue.

Notre correspondant (le 2e à partir de la gauche) est accueilli par des sujets de sa gracieuse Majesté à une fête de rue



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Journaliste franco-britannique

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