Quel que soit l’adversaire que le président de la République affrontera au deuxième tour, que ce soit Marine Le Pen ou même Valérie Pécresse, il aura du souci à se faire.
J’éprouve une mélancolie démocratique à l’idée que rien n’est vraiment gagné pour tous ceux qui ne souhaitent pas la réélection d’Emmanuel Macron. Des candidats enjambent le premier tour et semblent persuadés qu’ils l’emporteront aisément face à Emmanuel Macron au second. Rien n’est moins sûr. Observant les discours et les prestations des uns et des autres, au risque de focaliser encore trop sur le talent, je ne vois personne qui ferait le poids face à Emmanuel Macron. Il y aurait bien sûr Jean-Luc Mélenchon mais il est peu probable de le voir au second tour.
Emmanuel Macron le Parisien, Emmanuel Macron l’Européen
Attentif à suivre la campagne de Valérie Pécresse et approuvant certaines de ses propositions – comme par exemple Molière au Panthéon ! -, je suis frappé de constater le clivage qui existe entre le Emmanuel Macron franco-français, plus précisément le Parisien qui peut exaspérer par son narcissisme, le sentiment qu’il a de sa supériorité, sa méconnaissance de la détresse de la France profonde, sa certitude qu’il est au centre du cercle de la raison et que hors lui, nulle sauvegarde possible pour notre pays.
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Il y a un président de la République qui ne semble pas décidé à donner le meilleur de lui-même à ses compatriotes mais de le réserver pour d’autres. À l’évidence, la France ne lui suffit plus.
Quand on l’entend à Strasbourg, au premier jour de la présidence française de l’Union européenne, ce n’est plus le même homme. Non pas que le discours qu’il tient sur l’Europe et sur l’Etat de droit – démocratie, progrès et paix – soit bouleversant de nouveauté mais au moins il semble exprimer de sincères convictions détachées des manœuvres politiciennes et du cynisme qui ne lui est que trop naturel dans le pré carré français.
A Strasbourg, Macron a répliqué brillamment à Bardella, Aubry ou Jadot
Lorsqu’il répond aux diverses interventions qui, pour ses opposants français, ont surtout consisté à lui reprocher sa politique nationale, il le fait, je dois l’admettre, avec une maestria qui me séduisent d’autant plus que je suis excessivement sensible à la forme. Il réplique brillamment, se moquant mais sans aigreur et avec esprit, rassemblant avec un art consommé de la synthèse tout ce qui a été dit pour s’en féliciter ou le critiquer.
Sa technique, sa dialectique, son intelligence me font peur.
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Valérie Pécresse face aux Français sur BFM TV n’a pas été mauvaise. L’exercice est difficile qui vous contraint à donner un point de vue éclairé sur une multitude de sujets ponctuels et pratiques. En ne permettant pas à l’invitée de sortir de la boutique pour entrer dans l’épopée, du fragmentaire pour transmettre une vision de la France. L’élection présidentielle est un récit qu’une personnalité qui aspire à la plus haute fonction raconte à ses concitoyens.
Je sais bien qu’il est de bon ton, pour faire sérieux, de prétendre ne s’attacher qu’au fond mais aucune victoire ne sera possible si on ne prend pas la mesure des dons et de l’incroyable force de démonstration d’Emmanuel Macron. Avec l’obligation d’être meilleur que lui pour le langage et dans la contradiction.
Rien n’est gagné mais tout est possible. Encore beaucoup de travail.