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Pas de récession pour le déclin


Nicolas Baverez donnait le 17 août une interview au Journal du Dimanche : « Il faut dire la vérité aux Français ». Jérôme Leroy n’a pas eu besoin de rencontrer le plus grand économiste français de tous les temps pour lui arracher un entretien. Quand on est écrivain, on sait rédiger soi-même les questions et les réponses.

Nicolas Baverez, votre réaction à la taxation de 1,1 % décidée par Nicolas Sarkozy pour financer le RSA ?
C’est un très mauvais signe envoyé aux forces vives de la nation : patrons du CAC 40, retraités par capitalisation, rentiers, socialistes strauss-kahniens. Ces 1,1 %, nous allons les payer très cher en matière d’emploi, notamment dans l’embauche de personnel de maison (chauffeurs, jardiniers, porteurs de chaise, valets de pieds, cuisinière tamoul pour déniaiser le fils de la maison). Gâcher un tel gisement d’emplois, alors que tant de Français modestes attendent aux portes des hôtels particuliers, me laisse songeur. Quant on pense au modèle anglais et à la domesticité employée par les classes supérieures, on s’aperçoit du gouffre qui nous sépare de cette société moderne, flexible mais où chacun a néanmoins compris quelle était sa place dans le redressement de la nation.

Mais en ce qui concerne le RSA ?
Son montant est scandaleusement élevé. Des couples vont parfois vivre avec 400 euros par mois, ce qui est effrayant quand on pense à la crise financière larvée qui frappe nos riches difficilement protégés par un bouclier fiscal – cette mesure de la dernière chance pour ne pas désespérer Deauville et Chamonix. Donner le goût de la facilité, voire du luxe, aux classes populaires peut avoir des conséquences négatives, et même dangereuses. Si le pauvre, en général alcoolique, achète des alcools de meilleure qualité et commence à consommer du Bushmill malt plutôt que du Label 5, son foie se dégradera moins rapidement et il utilisera davantage sa CMU, aberrante couverture sociale de type soviétique. Et il lèguera, outre son alcoolisme à ses enfants dégénérés, une dette encore aggravée par les débauches budgétaires de gouvernements archéojacobins qui ont décidément bien du mal à se libérer de réflexes honteusement keynésiens.

Aucun avantage, donc, à ce RSA ?
Allons, allons, je ne suis pas non plus un hayekien de stricte observance ! Le RSA pour peu qu’on révise son montant à la baisse, et qu’on le fasse financer non plus par le capital mais par exemple par le Téléthon (il ne faut pas exclure les malades orphelins de l’effort de redressement national, ils le sont déjà assez comme ça) peut avoir un effet incitatif sur l’embauche. Conditionné à une activité, le RSA permettra aux patrons de licencier massivement les smicards afin de réembaucher dans des conditions plus avantageuses, libérant ainsi de la trésorerie et rapprochant le coût du travailleur français de son homologue indien, brésilien et, surtout, chinois.

Néanmoins, on vous sent réticent…
Bien entendu. Comment voulez-vous que je n’aie pas l’impression d’un pas en arrière, alors que j’ai senti le président Sarkozy très ouvert durant la campagne présidentielle à certaine de mes propositions qui sont depuis, hélas, passées à la trappe.

Lesquelles par exemple ?
Le travail des enfants, ce tabou absurde. Nous ne sommes plus au temps de Victor Hugo : « Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit / Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit. » On peut imaginer un travail des enfants à visage humain. Des études de nombreux think tanks anglo-saxons montrent l’utilité pédagogique d’un contact précoce avec le monde de l’entreprise. L’acuité du regard d’une petite fille de onze ans, la finesse de ses doigts peuvent faire merveille dans l’assemblage de l’électronique de précision. Des entreprises de pointe comme MicroTechnics à Rennes auraient été bien inspirées d’employer des enfants plutôt que des ingénieurs syndiqués, surpayés et souvent socio-démocrates. Sans compter que le travail des enfants permettrait aux working poors français d’améliorer leur ordinaire, comme cela est très bien expliqué dans La situation de la classe laborieuse en Angleterre de Engels ou, pour ceux qui sont moins diplômés et cultivés que moi, dans Germinal de Zola. On pourrait également – avec un peu de courage politique et quelques aménagements juridiques proposés simultanément par la France, la Grande-Bretagne, l’Italie et l’Allemagne à la Cour européenne des droits de l’homme – rétablir l’esclavage. Le salariat n’est plus adapté à la mondialisation. L’esclavage garantirait une main d’œuvre efficace pour l’entreprise. Il faudrait bien sûr que l’Etat, en cas de conflit entre l’esclave et le patron, offre la possibilité d’un arbitrage juste et empêche les excès de certains patrons voyous (lapidation, mise à mort, mutilation). Mais seul un Etat dégraissé, un Etat dont les inspecteurs du travail se seraient débarrassés de leur vision cryptomarxiste de l’entreprise et auraient relu Sénèque et La Boétie, pourrait assurer cette mission et assurer à l’esclave les garanties de dignité élémentaires dans une société moderne.



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