Albert Londres, Joseph Kessel, Albert Camus, Arnaud Viviant et Edwy Plenel ont dû se retourner dans leur tombe. Je vous le dis : journalisme… c’est bientôt fini ! En effet, nous apprenons par plusieurs sources (dont Owni)[access capability= »lire_inedits »] qu’une start-up américaine a récemment mis en œuvre un angoissant robot que l’on pourrait qualifier de « journaliste artificiel », capable de rédiger tout seul des articles d’information. Cette technologie informatique innovante permet ainsi au site Statsheet de traiter de façon automatisée – et en temps réel − les résultats et performances de plus de 300 équipes de basket-ball américaines. Les articles auto-générés par des algorithmes sont des comptes-rendus de matchs (assortis d’informations statistiques sur les différents aspects des rencontres) rédigés dans un style factuel, parfois âpre, mais sans bavardage ni erreurs de syntaxe.
Pour l’instant limité au traitement des résultats sportifs, cet embryonnaire « journalisme artificiel » − développé à l’origine par un laboratoire de l’université Northwestern (Chicago) – était présenté en ces termes, dès 2009, par Le Monde : « [Le robot journaliste] reconstruit le déroulé du match en langage informatique. Ensuite, il va puiser son vocabulaire dans une base de données contenant une liste de phrases, d’expressions toutes faites, de figures de style et de mots-clés revenant fréquemment dans la presse sportive. Il va alors rédiger un article, sans fautes de grammaire ni d’orthographe. » Le journal vespéral évoquait même les ambitions désagréables d’un chercheur prétendant révolutionner le dessin de presse : « Je vais prouver qu’une machine peut générer du contenu humoristique de façon robuste et régulière. » Evidemment, tout ceci relève encore largement de l’utopie, du tâtonnement numérique, du bricolage onirique, de l’élucubration… et se limite pour le moment au sport.
Mais le moment viendra-t-il où cette technologie sera capable de traiter des questions politiques ou sociétales ? Où les « robots-journalistes » produiront de manière autonome des commentaires, voire des opinions, grâce à leur hypothétique intelligence artificielle ? Connaîtrons-nous le temps des Mac « éditocrates » ? Et des PC d’investigation ? Question subséquente : comment diable intimider un « robot-journaliste » devenu gênant ? En cambriolant son appartement ? En lui volant l’ordinateur qu’il est lui-même ?
Autant de questions angoissantes auxquelles, dans quelques années, le « journaliste artificiel » talentueux qui rédigera à lui seul tous les articles de Causeur répondra certainement avec tout son cruel bon sens et un humour « robuste et régulier ».[/access]
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